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1 mai 2012 2 01 /05 /mai /2012 20:50

 

 

Gérard Jan, né en 1961, issu d’une famille de vignerons du Minervois, a forligné en entrant à l’école des Beaux Arts de Toulouse. Il a suivi là-bas le cursus ordinaire et a rencontré le dessin et la gravure réunis en la personne de René Izaure. Ce professeur, lui–même élève de Louis Louvrier, l’héritier scrupuleux de la gravure de reproduction du XIXe siècle, lui a transmis son intérêt pour les paysages méridionaux , marqués par les saules, les cyprès, les canisses et le vent. De cet enseignement, Gérard Jan a retenu à son usage les techniques de l’eau-forte et de l’aquatinte qu’il combine volontiers.

 

Il a surtout rencontré Piranese. Ce graveur architecte du XVIIIe siècle s’est illustré par des vues de Rome, et de ses environs, des antiquités de Pompéi et d’Herculanum, des relevés exacts de décors de sarcophages, d’inscriptions, d’objets de fouille, de statues et de vases.  Mais la valeur artistique des gravures de Piranese se manifeste encore dans des architectures imaginaires, rendues gigantesques par le rapetissement des figures humaines, par les perspectives surprenantes, au ras de l’eau, au ras du sol, à vol d’oiseau, par les vues de prisons fantasmées, peuplées de captifs, enfoncées de plusieurs étages sous la terre, meublées d’instruments de tortures et de machines délabrées. A ces paysages ne manquent pas les mendiants, les ouvriers des fouilles, les curieux d’antiquité, les captifs, mais sur tout ce monde plane l’ombre de la mort, les os sortent de la terre et des sarcophages, les inscriptions dans le marbre se brisent, les édifices les plus majestueux s’écroulent et ne ressuscitent que dans les vues idéales de l’architecte. De Piranese, Gérard Jan a d’abord gardé les lumières qui tombent dans des bâtiments obscurs (Formes du silence), l’éclairage rasant qui fait ressortir la texture des pierres, des briques, du métal et du bois (Chemin de travers, Evoutement de la lumière). Il a  emprunté à Piranese l’arche noire, le point de vue au ras de l’eau  du Pont incendié,  il  lui doit aussi le goût mélancolique pour le spectacle de la ruine. Saint Etienne, cathédrale de Toulouse, Saint Sernin, les Jacobins ne sont pas encore écroulés, mais dans Dérive immobile, Découverte du temps qui s’achève, Le monde parallèle, on voit ces édifices envahis de végétaux grimpants, encombrés de palissades, de planches, d’outils abandonnés, les voûtes écroulées, les arcs à ciel ouvert. A part les deux moines passant avec leur bourdon devant l’église gothique de Le monde parallèle, et une foule armée de piques sur le pont de Toulouse (Le pont incendié), les ruines sont désertes. Le Moyen-Age a remplacé l’Antiquité dans le vocabulaire des formes, puis les formes gothiques ont été remplacées par les édifices du XIXe et du XXe siècle : pile de viaduc en pierre de taille, pont de chemin de fer en ruine, château d’eau en briques, dépôt de chemin de fer, maison d’éclusier, passerelle métallique, demeures néo-gothiques, cabanes d’ostréiculteur, mais la méditation continue sur les marques du temps, la dégradation des œuvres humaines, la chute des civilisations, et tout objet abandonné dans le bric-à- brac obscur entre deux contreforts, sous une voûte d’escalier, devient une vanité, un memento mori  de notre temps.

 

Il y avait cependant une vie dans ces monuments et ces paysages déserts, on en a des traces : les voiles qui sont suspendus devant les monuments médiévaux de Toulouse (Découverte du temps qui s’achève, Ciel ouvert , Dérive immobile), indices de chantier, les objets abandonnés, planches, roues, pieux, cercles de tonneaux, fenêtres, ferrailles, escalier, échelles, grilles, bâches, garde-fou, fagots de piquets, reliques du travail humain dont les empilements sont l’indice d’une retraite inexpliquée. Dans la campagne, les troncs même des saules portent les marques des tailles d’antan. Mais la vie vient du vent : les herbes sont couchées par son souffle, les canisses sont à terre, les cyprès n’ont plus de branches ni d’aiguilles, ce sont  des flammes qui s’élèvent en ondulant.

Le mouvement vient aussi des lignes du dessin, des obliques qui traversent l’image et contredisent la frontalité des vues monumentales. Il vient enfin du cadrage qui coupe les objets (Galerie, Le pilier, Le dépôt) et oblige à poursuivre les lignes hors champ.

 

Anticipation de la ruine, mélancolie, silence de l’homme, mais aussi  survie de ses traces dans les choses, acuité sans pareille du regard sur les matières, netteté de la lumière et des effets qu’elle produit, tels sont les traits du monde que Gérard Jan a conçu, puis  quitté pour explorer d’autres voies.

 

Michel Wiedemann

Talence le 28 mars 2012.

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Published by Aristarque - dans Histoire de l'art
20 mai 2009 3 20 /05 /mai /2009 21:56

ESTAMPE D'AQUITAINE

 

 

Catalogue de l'exposition 

 

GRAVEURS AQUITAINS

à l'occasion de l'Assemblée générale du 31 janvier 2008 .


Cette exposition est disponible pour être présentée dans des lieux voués à la culture, musées, médiathèques, galeries etc. Contactez le président de l'EDA à l'adresse estampeaquitaine@aol.com 

 

1.      Pierre LACOUR (1778-1859)
Museum d'histoire naturelle, des arts et d'instruction publique  de Bordeaux, 1807,  eau-forte.

 

 

 



LACOUR Pierre

peintre, graveur, archéologue, philologue, littérateur, né à Bx le 16 mars ou le 16 avril 1778, mort à Bx le 17 avril 1859, fils du peintre Pierre Lacour ou Delacour.


Fondateur du Musée, secrét. gén.  et présid. de l'Acad. de Bx où il avait été élu en 1811 ; prof. et dir. de l'école de dessin et de peinture de cette ville ; corresp. de l'Institut, (acad. des Beaux -arts)  en 1814.  Pierre Lacour a beaucoup gravé ; son talent, un peu froid, ne manque ni de grâce, ni de charme. On connaît de lui : Mon portefeuille, recueil in-folio de 150 dessins lith, tiré à 50 ex. en 1826; Album autographique, recueil de 55 dessins, tiré à 20 ex. seulement, 1830 ; en 1836, Etudes sur les vieux maîtres, 20 pl. et bon nombre de dessins, portraits, paysages, qu'il serait trop long de mentionner. Cet artiste lettré a encore publié : Antiquités Bordelaises, 1806 , in-fol. avec pl. (Lacour père a collaboré à cet ouvrage)  ; Mém. sur des Mercures antiques, Bx, Brossier, 1807, in-8° avec pl. ; De la sculpture chez les Anciens; Bx, Lawalle, 1816, br., in-8°; Essai sur les hiéroglyphes égyptiens, Bx , Brossier, 1821, in-8° de 296 p., avec pl. Son système sur l'analogie des hiéroglyphes et des caractères hébraïques n'a pas eu l'approbation des érudits (V. l'article d'Abel de Rémusat  sur le Journal des Savants, avril 1821). L'Essai n'est cependant pas un ouvrage ordinaire, surtout pour l'époque où il a paru. Æloïm ou les dieux de Moïse, 1830, 2 vol. in-8°, 26 pl. Æloïm figure sur la liste des ouvrages condamnés par la Congrégation de l'index ; Influence morale sociale et progressive du monothéisme, 1849. Origine chez un peuple noir et africain de la langue hébraïque et du monothéisme hébreu, 1850. Ce travail suscita des réponses de MM. Charles Des Moulins  et Cirot de la Ville extrêmement curieuses. Examen des assertions publiées dans le recueil des Actes de l'Acad de Bx. contre un mémoire intitulé : Origine, etc...; Aperçus extrait d'un travail relatif à l'influence morale  et sociale de l'esprit du polythéisme, comparée à celle de l'esprit du monothéisme, Bx, Balarac, 1857, in-8° de 182 pp. Ces quatre dernières publications appartiennent à un grand ouvrage resté inédit et qui devait porter le titre de : Apophis vaincu par les Dieux, et former deux volumes semblables aux Æloïm; quoique basés sur un point de vue reconnu faux, tous ces ouvrages n'en sont pas moins extrêmement remarquables ; Catalogue des tableaux, statues etc du Musée de Bx, par P. Lacour et J. Delpit, Bx , 1855 , in-18. Lacour a encore collaboré par la plume et  le crayon au  Bulletin polymathique de Bx, à la Ruche d'Aquitaine, et a été le principal rédacteur du Musée d'Aquitaine en 1823-24, et de La Gironde 1833-34. La France littéraire attribue à Lacour  l'ouvrage suivant : Les monuments de sculpture anciens et modernes, Paris, Bance, 1812, in-f° avec 72 gr.  au trait. Le Catalogue des livres et estampes composant la bibliothèque et le cabinet de feu M. Lacour, Paris, Techener, 1860, in-8° mentionne, sous les N° 167 et 215, les ouvrages suivants : 2.524.000 beaux paysages ; specimen d'un système  par lequel on peut composer un nombre infini de paysages aussi facilement qu'on dessine les mots d'une langue. Par P. Lacour, Bx, 1850, 2 vol. petit in-f°, et Croquis faits en traversant le Simplon le 5 et le 6 oct. 1824, par P. Lacour, Bx in-f°, 18 vues. Les tableaux, dessins, gravures, livres et objets d'art délaissés par Lacour furent vendus à Bx du 12 au 23 mai 1859. Cette vente a dispersé un grand nombre de portefeuilles contenant des croquis dessinés au crayon et à la plume ; vues d'Italie, paysages, études d'après l'antique, etc de Lacour et de son père, dont plusieurs sont fort beaux et qui n'ont jamais été gravés. Les collections Jules Delpit et Bordes de Fortage en contiennent un certain nombre. Le catalogue imprimé par Balarac, in-8° de 16 p. renferme quelques indications utiles sur les tableaux, dessins, gravures etc de cette famille d'artistes. P. Lacour avait épousé en 1813 Mlle Lysidice Combes, fille du célèbre architecte  girondin. Dans son éloge de Pierre Lacour, Bx,  1862, in-8° de 39 pp., M. Jules Delpit  promettait au public une vie de l'artiste bordelais. On doit regretter que l'érudit écrivain n'ait pas encore tenu cette promesse.

( in Féret, Statistique de la Gironde, 1889)


 

2. Léo DROUYN (1816-1896) Les grandes landes ,eau-forte.

 

 

 

 

 

 

  1. Léo DROUYN (1816-1896) Cathédrale de Bordeaux, e-f.

 

 

 


DROUYN ( François Joseph Léo) 1816-1896

Archéologue, aquafortiste, né à Izon le 12 juil. 1816.  Fit ses études classiques à Nancy et ses études artistiques à Paris dans les ateliers de Quinsac-Monvoisin, Paul Delaroche, Coignet et du graveur Marvy ; prof. de dessin au collège des R. P. jésuites de La Sauve de 1851 à 1853; conservateur du musée des antiques de Bx de 1852 à 1856 ; prof. de dessin au lycée de Bx de 1858 à 1866 ; membre de l'Académie de Bx depuis 1850, en a été le président en 1872; membre de la Société des antiquaires de France depuis le 23 déc. 1859; membre de l'Institut des provinces depuis le 23 juil. 1858 et de plusieurs autres sociétés savantes ; membre de la commission des Mon. Hist. de la Gir. depuis le 14 nov. 1862; corresp. du ministère de l'Instr. publique depuis le 12 oct. 1868 ; inspecteur des archives communales de la Gir. de 1865 à 1871, memb. de la commission topographique des Gaules depuis 1866 ; chevalier des palmes académiques le 23 avril 1881, le 19 avril 1884 ; Légion d'Honneur le 9 août 1870.

A figuré aux salons bordelais depuis leur création, presque tous les ans par des eaux-fortes, des fusains, des dessins à laplume et des tableaux à l'huile ; a figuré au salon de Paris en 1865, 1867, 1887, a obtenu en 1867 méd. pour la gravure à l'eau-forte, a figuré dans plusieurs expositions de province, où il a été plusieurs fois médaillé ; a publié un grand nombre d'ouvrages parmi lesquels nous citerons: Choix des types les plus remarquables de l'architecture au Moyen Age dans le département de la Gironde, album de 50 eaux-fortes, in-folio Bx (texte par Léonce de Lamothe) .- Album de la Grande Sauve, 16 eaux-fortes, in-folio avec texte, Bx 1851.- Croix de procession, de cimetières et de carrefours, 10 gravures à l'eau-forte, avec texte in-folio, Bx, 1858, publié dans les Actes de l'Académie de Bx. - Guide du voyageur à St Emilion, Bx, 1859, in -12, avec dessins à la plume.- Album de 15 gravures à l'eau-forte ( paysages) publié par l'Alliance des Arts. - La Guyenne militaire, histoire et description des villes fortifiées, forteresses et châteaux du département de la Gironde construits pendant la domination anglaise, 2 vol. ornés de 150 pl.  gravées à l'eau-forte, in-4°, Bx, 1859-1865, épuisé, très rare; Essai historique sur l'Entre deux  Mers, publié dans les Actes de l'Académie de Bx, 1870. - Promenades archéologiques dans l'Entre-deux-Mers, (Bulletin de la Société Archéologique de Bx, 1874. );  Tizac de Galgon, étude historique, Bx, 1875, in-8°; Izon, monographie, histoire et archéologie, Bx, 1876, in-8°;  Les variétés girondines ou essai historique et archéologique sur la partie du diocèse de Bazas renfermée entre la Garonne et la Dordogne, Bx, Féret & fils, 1878-1887, 3 vol. gr. in-8°, ornés de gravures dans le texte et d'eaux-fortes hors texte. - Bordeaux en 1450, publication des Archives municipales, Bx, Gounouilhou, 1874- in-4° avec plan et dessins, - Comptes de l'Archevêché de Bx au XIV e siècle, Bx, Gounouilhou, 1881-1882, 2 vol. in-4°.

M. Léo Drouyn a publié en outre une foule d'études archéologiques insérées dans diverses revues ou bulletins, entr'autres dans  la Revue Catholique de Bx, et a exécuté pour ces divers travaux environ 1550 gravures. A exposé depuis quelques années aux salons de la Soc. des Amis des Arts des dessins à la plume très remarqués.

(Féret, ibidem)

 

5. Jean-Baptiste Joseph Jules,
baron de VERNEILH-PUYRASEAU (1823-1899)
Ancienne église saint Rémy, e-f.

 

 



Né à Nontron (Dordogne), le 6 février 1823, mort dans son château de Puyraseau (commune de Piégut-Pluviers, Dordogne) le 28 mai 1899. Artiste et archéologue, issu d'une glorieuse lignée d'écrivains, il fut membre de l'Institut des Provinces, inspecteur divisionnaire de la Société française d'Archéologie, président de la Société historique et archéologique du Périgord., membre de la Société des Archives historiques de la Gironde et de la Société des Amis des Arts de Bx, correspondant du Ministère de l'instruction publique, membre de l'Académie de Bx,  où il fut élu le 13 mai 1875. On lui doit des études archéologiques sur les maisons de la Renaissance de Périgueux et sur  certains monuments du Midi de la France, qui ont paru dans les volumes du Congrès de la Société française d'Archéologie et dans le Bulletin Monumental. Aquafortiste remarquable, comme son contemporain et ami Léo Drouyn, il nous a laissé l'Album du vieux Périgueux, et il a magnifiquement illustré le célèbre ouvrage de son frère Félix de Verneilh sur l'Architecture byzantine en France. Il a publié dans les Actes de l'Académie de Bx, Anciens voyageurs à Bx (1875), De la décadence de la grande peinture à Bx et des moyens d'y remédier, (1879); Les peintures décoratives pour le grand escalier de la Bourse (1892) . Un buste a été élevé à sa mémoire à Périgueux.

( in Jean et Bernard Guérin,Des hommes et des activités, autour d'un demi-siècle. Editions B.E.B., 1957)

 

 

 

 

6. Maxime LALANNE (1827 - 1886) Incendie dans le port de Bordeaux 1869, e-f.

 

 

 

 

 

7. Maxime LALANNE ( 1827-1886) A Bordeaux, e-f.

 

 

 

 


LALANNE Maxime  François Antoine

Dessinateur, aqua-fortiste et peintre, né à Bx le 27 nov. 1827, mort à Nogent sur Marne  le 30 juillet 1886.  Fils du précédent (Antoine Lalanne , greffier de la cour d'appel de Bx  et poète du billard). Ses débuts dans la carrière artistique eurent lieu à Bx où il obtint une médaille de bronze à l'exposition de la Société philomathique en 1850. Fut médaillé la même année à celle de Metz. Vint à Paris en 1852, où il fut élève de Jean Gigoux et où il a exposé à tous les salons depuis 1852 ; méd. de 3e classe au salon de gravure, 1866 et 1874 ; méd. au salon de peinture, 1873 ; méd. de 2 e classe à l'expo. de Porto, 1866 ;  deux diplômes d'honneur à Amiens, 1866 ; diplôme d'honneur à Nevers, 1872 ; prix du ministre à Laval, 1876 ; méd. à l'expo de Vienne, 1873 (deux sections : peinture et gravure ) ; méd. d'or décernée par l'Acad. de Bx pour son ouvrage La Hollande à vol d'oiseau, 1881 ; chev. de l'ordre du Christ, 1864; chev. de St Grégoire le Grand, 1866 ; légion d'honneur,1875 ; palmes académiques le 31 déc. 1878 ; mem. correspondant de l'Acad . de Bx en 1867 ; memb. du jury à l'expo. internationale du Hâvre, 1868; memb. du jury au salon de Paris (peinture ), 1869, 1870, 1872, 1875, 1880 à 82 ; membre de la commission des quatre-vingt-dix au salon de Paris, 1881, 1882, 1883, 1884 ; membre du jury à l'expo. d'Amsterdam, 1883; membre correspondant de l'Acad. des sciences, belles lettres et arts de Rouen, 1883.  

Parmi ses nombreux travaux, nous citerons : Chez Victor Hugo, par un passant, texte par Lecanu, 12 eaux-fortes in-8°, Cadart éditeur à Paris, 1864 ; Le billard, traité en vers par Antoine Lalanne, 2 eaux-fortes, in-8° Paris, Aubry, 1866 ; douze croquis à l'eau-forte, d'après nature, 1869 ; douze planches sur le siège de Paris, 1870-71, d'après des dessins faits sur nature aux 5e, 6e, et  7e secteurs, Paris, 1870-71; collection de 75 fusains reproduits par la pantotypie, Paris, Berville et Bernard, 1875; Traité de la gravure à l'eau-forte, texte et 8 pl. in-8°, Cadart, 1866; Le fusain, in-8°, Paris, Berville, 1869 ; La Hollande à vol d'oiseau, texte par H. Havard, avec cent soixante-douze reproductions de dessins d'ap. nature, gr. in-8° ; Paris, Quantin et Decaux, 1881; La Flandre à vol d'oiseau, par le même, soixante reproductions de dessins, gr. in-8°, Paris, Decaux, 1883 ; Rouen pittoresque, Rouen, Augé, 1886, gr. in-8° ; grand nombre de pl. parues dans diverses publications : La Gazette des Beaux arts  depuis 1863, L'Art, et l'Illustration Nouvelle, depuis 1868; le Porte-folio ; les catalogues illustrés des grandes ventes; etc; nombreux dessins au fusain, au crayon et à la plume dans l'Illustration, le Monde illustré, le Paris-Guide.

A eu de nombreux élèves  à Paris et à Bx, artistes ou amateurs distingués. A organisé des expositions  particulières de ses œuvres à Paris en 1874, à Bx en 1874, avec un catalogue de 660 numéros, à Marseille en 1875, à Trouville en 1876.

Les musées de Bx , d'Orléans, Troyes, Evreux, Rouen, Lille, Besançon etc, possèdent des dessins ou des gravures de M. Lalanne. Il a laissé un grand nombre de dessins et eaux-fortes et quelques peintures à l'huile vendues aux enchères à Paris ou à Bx en 1887. Maxime Lalanne est à coup sûr au milieu de la pléiade d'artistes peintres ou dessinateurs que Bx a vu naître, un des plus grands, un des plus sympathiques, un de ceux dont notre cité doit le plus s'honorer.

V. l'excellente étude de M. Marionneau sur Maxime Lalanne parue dans la Gironde littéraire du 29 août 1886, publiée à part in-8°, Bx , 1886, et dans Artistes contemporains du Pays de Guyenne, etc, Bx, Gounouilhou, 1889, gr. in-8°.

(Féret, ibidem)

 

8. Pierre TEYSSONNIERES (1834- ...) Allée de Trubesset à Fargues, e-f.

 

 

 

 



TEYSSONNIÈRES
  (Pierre)

peintre et graveur, né à Albi (Tarn) le 6 juin 1834. Elève de son père et de MM. Maxime Lalanne et Léo Drouyn pendant le long séjour qu'il fit à Bordeaux ; a exposé au salon de Bx depuis 1866  et à celui de Paris depuis 1868, y a obtenu une 3e médaille, en 1878 ; a été aussi médaillé aux expositions internationales de Londres, Amsterdam, et Barcelone, 1ere médaille. Officier d'Académie le 13 juillet 1888 et décoré de plusieurs ordres étrangers. Ses œuvres sont très recherchées en Amérique surtout. Parmi ses très nombreuses productions, citons les œuvres ci-après qui ont figuré au salon de Paris: Le pont de Bx, eau-forte, 1868, Les bords de la Garonne à Lormont, Les oubliés de la Bastille, Forêt de l'île de Cuba, eaux-fortes, 1869; La rue Quintin à Bordeaux en 1865 peinture, 1869 ; Le donjon de Libourne (Gir.) et Les buveurs, peintures, 1870, N-D d'Arcachon, Dans les Landes (Gir.), peintures, 1870; La digue de la Garonne à Saint-Macaire et La plage d'Andernos, peintures, 1872. Vainqueur ou vaincu , eau-forte, 1873; La mort du duc d'Enghien, Le pape Formose et Saint Ambroise instruisant Honorius enfant d'après J. P. Laurens, 1874 ; Le chemin de Robin à St Macaire, peinture, et Le ravin de la Castillane, fusain, 1875; Le quai de la monnaie à Bx, aquarelle; Les environs de St Pierre de Langon, peinture, 1876; Don Juan, Les Fourberies de Scapin et autres planches, d'après E. Bayard, pour le Molière de M. H. Bordes, 1877. Eliezer et Rebecca, d'après Tiepolo, mention hon. 1877 ; Chasse au faucon, d'après Fromentin, gravure reçue à l'exposition universelle de 1878 ; Le château Brown-Cantenac, eau-forte, 1879; La Magdelaine et décor de marionnettes, d'après de Beaulieu, 1880; La buttte des Clines, (Eure), peinture, 1881 ; La brèche de Sahorre, peinture appartenant à M. de Lalande, 1882; Portrait de Pierre Corneille , d'après le portrait original de Lebrun, gravure, 1882, Travail et débauche, Fileuse et Tricoteuse, fac-similés de dessins d'après Millet; L'alcool d'après de Beaulieu ; Un apprenti, d'après  S. Durand, eaux-fortes,1833 (sic); Le cap de Grouin,  peinture, Samson terrassant les Philistins, d'après Decamp ; Paysages d'après Rousseau, Corot, etc. eaux-fortes, 1884; Portrait de Molière d'après une peinture du temps; dessins de Leloir pour Jacques le fataliste, eaux-fortes, 1885 ; Deux filles de la mer, d'après Delobbe; Portrait de l'abbé Michon et de Varinard, eaux-fortes, 1886; Rivière de Cady, fusain, et Marie Stuart, eau-forte, 1887; Rentrée à la ferme, d'après Vernier, et Le Duel, d'après de Beaulieu, eaux-fortes, 1888; Retour de pêche d'après Feyen-Perrin,1889. L'exposition universelle de 1889 contient de cet artiste : Travail et débauche, d'après Millet, L'alcool d'après de Beaulieu. On lui doit le joli portrait  d'après Lagrange-Chancel, placé en tête de ses Poésies inédites, publiées en 1878 par M. J. Delpit.

(Féret, ibidem ).

P.Teyssonnières a habité 3 rue Duffour-Dubergier à Bordeaux et 92 cours des fossés à Bordeaux, comme en font foi des cartes de visite gravées à l'eau-forte, de la collection J. C .

1. Une embarcation à voile et un débardère sur un fleuve bordé d'arbres, e-f , 57 x 83 mm aux limites du sujet sans t.c., avec adresse P. Teyssonnières Cours des fossés 92 Bordeaux

2. Un voilier à sec sur un banc de sable, devant un horizon marin et quatre barques, même adresse, e-f, 47 x 95 mm au t.c.

3. Un voilier amarré à un débarcadère terminé par une grue, devant un fleuve avec deux bouées et deux peupliers à droite. E-f, 58 x 111 mm au t.c. avec l'adresse P. Teyssonnières 3 rue Duffour-Dubergier Bordeaux.

4. Un chemin de halage au bord d'un vignoble, avec un voilier, un bouquet d'arbres et une maison à droite. Même adresse que le précédent. E-f  59 x106 mm.

Il a publié chez Cadart.

 

 

10. Raymond GAUTIER-CONSTANT  (1907-1978)  [Paysage de montagne ], burin.

 

 

 



GAUTIER-CONSTANT ( Raymond )

Né à Bordeaux le 15 mai 1907. Illustrateur, graveur, élève de J. B. Vettiner et J. Hubert-Gautier. Professeur à l'école des Beaux-Arts de Bordeaux, depuis 1943. Exposant à plusieurs salons. A participé à Paris notamment à l'exposition Retour de captivité  au Musée Galliéra, après la guerre de 1939, où il fut lui-même fait prisonnier.  Plus récemment  a fait une exposition personnelle d'ensemble sur invitation du Musée du livre à Bruxelles en 1954.

Son œuvre comprend des ouvrages divers et des illustrations (en taille-douce et en épargne) de livres parmi lesquels nous citerons notamment : Du néant à la vie, Le pèlerin dans la cité de J. M. Eylaud ; les Maximes de La Rochefoucauld (chez l'artiste) ; Images de Montesquieu (chez l'artiste ) ainsi que des ouvrages de grand luxe pour présentation de vins chez des restaurateurs parisiens réputés. En 1947, l'académie Montesquieu lui  a décerné son grand prix pour l'ensemble de son œuvre artistique en faveur du grand écrivain. 

(Jean et Bernard Guérin, Des hommes et des activités, autour d'un demi-siècle. Editions B.E.B., 1957)

 

 

 CAMI ( Robert )

CAMI Robert (1900-1970) a fait l'objet d'une rétrospective à la Bibliothèque Municiaple de Bx en  décembre 1978 à l'initiative de René Buthaud. Né à Bordeaux dans une famille modeste qui le place comme apprenti boucher , il suit les cours du soir de l'Ecole des Beaux Arts avec l'appui de son patron, mais il n'y a pas de cours de gravure alors à Bx. Il reçoit une bourse pour s'inscrire à l'école des Beaux Arts de Paris, reçoit le prix de Rome de gravure en 1928 avec une Phryné à l'e-f. Il revient en 1932 dans sa ville natale où il ouvre un atelier de gravure à l'école des Beaux Arts. En 1942, il part à Paris avec sa femme. Il est nommé chef de l'atelier de gravure aux B.A. en 1945. Il passe à l'art abstrait en fin de carrière, après avoir exercé un rayonnement extraordinaire sur ses élèves. Buriniste, il pratique aussi l'e-f et la pointe-sèche, il a gravé au burin des centaines de timbres pour la France et les colonies.

M.W.

 

11. Robert CAMI (1900-1970) Les deux nus , pointe-sèche.

 

 

 

 


12. Robert CAMI (1900-1970) Nu aux bras levés , pointe sèche.

 

 







13. Paulette EXPERT (1912-2001)  Tête de jeune alsacienne vue de dos, burin.

 

 

 

 

 

EXPERT Paulette

Peintre et graveuse bordelaise, née le 13 février 1912 à Saint Médard de Guizières (33), décédée le 13 décembre 2001 à  Bordeaux .

Fille aînée d'un notaire, elle se passionne dès l'enfance pour le dessin. Elève de Roganeau et de Robert Cami à l'Ecole des Beaux Arts de Bordeaux, admise en 1935 à celle de Paris avec une bourse de la ville de Bordeaux, elle se présente au concours pour le prix de Rome de gravure en 1937 et en 1938. Le sujet imposé était : "Judith montrant au peuple la tête d'Holopherne". Elle est éliminée pour avoir juste inversé sa composition. Elle expose  en 1939  sa" Fontaine de l'Ecole des Beaux Arts", tout en donnant des cours  et en préparant le concours de professeur de dessin. Nommée à Péronne en 1942, mutée au lycée d'Aurillac en 1945, elle enseigne au lycée d'Angoulème en 1955-56. Elle est nommée le 20-12-1956 à l'Ecole des Beaux Arts de Bordeaux comme professeur de dessin et  de gravure, alternant avec M. Gautier-Constant. Elle en part à la retraite en 1976. Elle a beaucoup voyagé durant ses vacances : Nord de la France, Auvergne, Sud-Ouest, Alpes, Roussillon, Maroc, Algérie, Grèce, Italie, Espagne, Scandinavie. Elle a dessiné au crayon, à l'encre, au pastel, remplissant plusieurs centaines de carnets de croquis. En gravure, elle a pratiqué le burin et l'eau-forte au trait, en de rares occasions l'aquatinte et la gravure sur bois.  Elle laisse environ 150 cuivres gravés.

Paulette Expert avait de l'art une conception contemplative, n'y voyant qu'un reflet de la création divine. Elle a gravé des paysages et des monuments des pays qu'elle a connus ou traversés. Mais  toujours suivant les occasions et son inspiration, sans avoir comme Léo Drouyn, un projet encyclopédique, un plan de campagne systématique. Entretemps, l'inventaire monumental était passé à la photographie.

Elle dessinait les paysages, rivières, et animaux domestiques aperçus lors de ses voyages, elle excellait dans le portrait d'enfants, elle a fait des dessins de sa famille, de ses amis et de nus. Elle dessinait des arbres et des fleurs dans les jardins, des natures mortes chez elle, des bateaux dans les ports, dans les chantiers navals, lors des régates, des passages de voiliers. Elle était attentive au mouvement des vagues, aux remous des fleuves et au jet des fontaines.

Il y a plusieurs styles de Paulette Expert. Au burin, elle avait le trait ferme et net, elle ombrait par des tailles parallèles légères. Elle retouchait au crayon ses tirages jusqu'à ce qu'elle fût satisfaite de l'effet. L'ensemble demeurait clair en général. Elle a prolongé jusqu'à sa mort le style néo-classique de burin  hérité de Cami, dans l'eau-forte et la pointe-sèche, elle a un trait plus libre, fait de griffonnis et de repentirs, qui lui est tout personnel.

 

M. W.

 


14. Paul  LEUQUET ( 1932-...)
Figure de proue, burin.

 

 

 

 

 



Incarné  le 29 novembre 1932 à Bordeaux, Paul Leuquet est un homme singulier : fils d'artistes, il n'est jamais allé à l'école pour raison de santé et a reçu son savoir de précepteurs. Plus tard, il s'est inscrit aux Beaux Arts de Bordeaux où il a été l'élève mal-aimé de Raymond Gauthier-Constant, dont il s'est rapidement séparé, de Robert Charazac, de François  Roganeau. Il a rimé, peint, dessiné, déclamé, joué la comédie. Il est devenu un Diogène moderne, mais artiste et écologiste: sa maison est envahie par les arbres, les herbes, les mousses et les chats. Il a illustré Divers jeux rustiques  de Du Bellay, édité par Vialetay en 1962, il a publié en 1964 quatorze burins Images de Bordeaux, puis en 1969 Images de la Nature, préfacé par René Huygues, livre constitué de 18 burins de grand format et d'autant de poèmes sur les animaux. Il a publié en 1995 Monsieur Dubois ou les mémoires de mon Ombre aux éditions Opale, sorte de roman picaresque et philosophique. Il a joué dans la troupe théatrale de Lucette Mouline, enseigné la gravure aux étudiants de l'université de Bordeaux III. Il est membre de l'Académie Montesquieu, et médaille d'or de l'Académie Nationale des Arts, Lettres et Sciences de Bordeaux.

Inclassable, étranger à son temps et à la société, Paul Leuquet a commencé comme artiste figuratif, il se fait ensuite medium des forces obscures et pratique une sorte de dessin automatique au stylo à bille. Il peint à l'aquarelle et à l'huile, travaillant dans des formats de plus en plus grands. Il sculpte aussi depuis quelques années des animaux sur des plaques de métal monumentales. Il s'intéresse à toutes les formes de la vie animale et portraifie volontiers le visage humain. Son œuvre gravé comporte environ 400 burins et 50 eaux-fortes.

Il grave au burin d'un trait très fin, sans contretailles, comme il dessine. Il couvre son cuivre de croquis inégalement poussés, renforçant les détails du monument, qu'il traite de plus loin et d'une main bien plus légère. On croirait voir dessiné sur le cuivre un album de ces voyageurs artistes  d'autrefois. Paul Leuquet n'a pas devant le monument la pensée de l'analyser en historien des écoles et des styles artistiques, il rêve, il rend visibles les morts revenant aux lieux qu'ils ont hantés. C'est un homme qui se promène dans sa culture et qui montre des lieux de mémoire chers à l'histoire locale ou nationale. Il déploie autour du monument ses corollaires.

La gravure de Paul Leuquet, son trait simple et pur, voire académique à ses débuts, se sont modifiés: "Je vais de la forme à l'informe, - apparent informe - contrairement à la conception habituelle de l'art". C'est que l'art est pour lui ésotérique et que l'artiste apporte des nouvelles de l'inconnu, de l'ailleurs, de l'Autre...

 

M.W.

 

 

Michel  DESPORTES 

( Fromental (Quercy) 20 août 1942- Brive-la-Gaillarde 1994 )

Etudes à l'école des Beaux-Arts de Bordeaux, où il est l'élève de Paulette Expert, puis de1966-67 à l'Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris, atelier Chapelain-Midy.

Diplôme National des Beaux Arts  en peinture, et en gravure obtenu à l'école des Beaux-Arts de Bordeaux, professeur de dessin à l'école d'architecture de Bordeaux de 1972 à 1994.

Graveur au burin et à l'eau-forte, lithographe. L'artiste tirait lui-même ses gravures sur une presse de taille douce TD.  Michel Desportes se disait, se voulait un graveur méridional  : il a représenté maints sites aquitains. Il a été intéressé par les déformations de la perspective, par la représentation dynamique de l'architecture, par le mouvement de la foule, le fouillis végétal des ronces. Il a publié une série de gravures sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle.

M.W.

 


15. Michel DESPORTES (1942-1994) Terrasses à Terrasson, e-f.

 

 

 

 

 




16. Michel DESPORTES ( 1942-1994) Le port d'Andernos , e-f.

 

 


 



17. Gérard TRIGNAC (1955-...) Le héros, e-f.

 

 

 

 

18. Gérard TRIGNAC (1955- ...) L'étranger, e-f.

 

 

 

 


Gérard Trignac

Né le 19 juin 1955 à Bordeaux. Formé comme technicien collaborateur d'architecte à l'Ecole d'architecture de Bordeaux  de 1975 à 1978, il passe brièvement à l'université et quitte cette voie pour se lancer dans une carrière artistique. Après une exposition à la galerie Condillac (1980), un 1 er prix de dessin de la ville de Bordeaux (1981), une bourse de gravure attribuée par l'académie des Beaux-Arts (1981), un séjour à la Casa Velasquez de Madrid (1982), sa carrière est lancée. Expositions personnelles et de groupe en France et à l'étranger, illustration de livres de bibliophilie : Tristan et Yseut , édité  par le Club du livre (1985), Ode à  Paris de Philippe Soupault, édité par la galerie Bernier (1986), L'Immortel de J. L. Borges, pour les Bibliophiles de l'Automobile-Club de France, Les Villes invisibles d'Italo Calvino, pour les Amis du livre contemporain. Son œuvre de 1979 à 1990 fait l'objet d'une monographie par Gilbert Lascault aux éditions Natiris (1990) et d'un catalogue par Robert Coustet, accompagnant sa rétrospective à la Bibliothèque Municipale de Bordeaux, Les Portes du Silence,  chez William Blake & Co (2004).

Au point de vue de ses thèmes, G. Trignac est , comme le dit R. Coustet, un rêveur d'architecture qui ne pratique aucun autre genre. Il ne fait pas de reconstitution de la Rome antique, ni d'inventaire du patrimoine bâti, il ne fait pas de plans pour la cité future: il dessine ses rêves. Il ne s'écarte de ses constructions imaginaires que dans la mesure où les textes qu'il illustre le réclament. De son propre fonds il tire un monde étrange de pierre ou de béton, où les échelles des objets se contredisent, où les vues en plongée ou en contre-plongée donnent le vertige.  On songe à Piranese pour les architectures et à Bresdin pour le fouillis végétal et les nuages, à des BD contemporaines pour le récit sous-jacent :  ces  villes semblent avoir été désertées par leurs habitants à la suite d'on ne sait quel cataclysme. Mais il n'y a pas chez Trignac de nostalgie de l'Antiquité, ni de méditation morale sur la décadence des civilisations : ses vues empilent  les époques en désordre, les appareils de pierre cyclopéens, les donjons médiévaux, les frontons antiques, les usines de brique du XIXe siècle, les formes colossales de Ledoux et les tuyauteries des pipe-lines. Dans ces ruines modernes et paradoxalement intactes, la racine ronge les monuments abandonnés, la végétation prolifère autour des eaux  croupies. Ou bien le ciel est couvert de nuages gris, ou bien on ne le voit même pas de ciel ni de soleil. Trignac aime les éclairages latéraux provenant d'une source cachée, les ombres nettes projetées par des arches de pierre sur un mur ou une voûte, les lumières qui se dégradent en ténèbres, qu'on sait silencieuses. Dans le traitement des sujets, il se sert parfois de la photo comme document préparatoire. Il compose son dessin à la plume, et le pousse jusqu'à obtenir une œuvre parfaitement finie, susceptible d'être exposée, puis il le grave patiemment et fait mordre la planche au perchlorure. On est loin des traits libres et bouillonnants, des repentirs de Piranese ou des broussailles inextricables de Bresdin. Il  a le trait rectiligne, régulier, un dessin pur, sans à peu près. Telles sont les figures singulièrement nettes d'un triomphe de la mort dont Trignac nous donne la version moderne.

 

M.W.

 

 

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Published by Aristarque - dans Histoire de l'art
30 mars 2009 1 30 /03 /mars /2009 23:27

 

Extraits

des

 

 

Mémoires

 

de

 

Michel de Marolles

 

abbé de Villeloin

[1657]

 

 

avec des notes historiques et critiques.

[par

l'abbé Pouget]

 

A Amsterdam

M. DCC. LV.

 

 

 

 

Réimpression dans l'orthographe du temps

par

Michel Wiedemann

 

 

 

 

 

 

 

©1998


 

Images en taille-douce.

Volume I, p. 288.

 

 

 

Dieu m'a fait la grace que pour aimer les images, je n'y ai point mis de superstition, & j'en ai fait un recueil si prodigieux, qu'elles se [ p. 289] montent à plus de soixante et dix mille ; mais c'est d'images en tailles-douces sur toute sorte de sujets. Je commençai à m'adonner à cette sorte de curiosité, dès l'année 1644 ; & je l'ai si bien cultivée depuis ce tems- là, & avec si grande dépense, pour moi qui n'ai pas beaucoup de bien, que je puis dire sans exagération, en avoir de tous les Maîtres qui se sont pu trouver, tant Graveurs que Dessinateurs & Inventeurs, qui sont en nombre de plus de quatre cens.

J'y ai rangé les livres de Cartes, d'Ecritures, d'Architectures, de Fortifications, de Sieges, de Circonvallations, de Batailles, de Combats singuliers, de Guerres navales, de Piéces maritimes, de Païsages, de Villes, de Châteaux, de Mers, de Fleuves, de Fontaines, de Puits, de Vases, de Jardinages, de Fleurs, de Ruines, de Perspectives, d'Horloges, de Cadrans, de Machines, d'Orfévrerie, de Menuiserie, de Gravures en fer & en cuivre, de Broderies, de Dentelles, de Grotesques, d'Animaux, d'Habits de Nations, d'Anatomies, de Portraitures, de Cartouches, d'Antiques, de Bas-reliefs, de Statues, de Cataphalques, de Tombeaux, d'Epitaphes, de [p. 290] Pompes funebres, d'Entrées de Villes, de Cavalcades, de Devises, d'Emblêmes, de Navires, de Pieces de cabinet, d'Arbres, de Fruits, de Pierreries, de Danses, de Ballets, de Comédies, de Bacchanales, de Chasses, de Faceties, d'Armoiries, de Tournois, de Massacres, d'Exécutions, de Supplices, de divers Jeux, de Fables héroïques & morales, d'Histoires diverses, de Vies de Saints, de Martyrs, de pieces de la Bible, de divers Ordres religieux, de Thèses, grandes & petites, & de plus de dix mille Portraits, sans compter plus de six-vingt volumes de Maîtres, entre lesquels sont pour l'Italie, Augustin Vénitien; Augustin Carrache; André Mantegne, Mantouan, le plus ancien Graveur d'Italie, André del Sarte, Florentin, Andrea Semino, Genevois; Andrea Andreatini Mantouan pour le clair obscur; Andrea Potesta; Antoine Tempeste, Florentin, pour l'eau forte; Angelo Bronzino, Florentin; Adam Scoltor, Mantouan; Annibal Carrache; Baptiste del More; Benedette; Etienne de la Belle; Baccio Bandinel; Baltasar Prerrucci, Siennois; Barthelemi Passarote, Bolognese; Bernardino Campi, de Cremone; Bocalini; [ p. 291] Camille Porcacin; Caralius; Cherubin Albert; Campagnola; Capitelli; Castiglionus, Genovese; Dominique Barbiere, Florentin; le Dominicain; Il Duche; Eneas Vicus, de Parme; François Mazzolin, Parmesan; François Salviati, Florentin; François Vannius de Sienne; François Bologne, Florentin, Abbé de S. Martin; François Villamene, Romain; Frederico Zuccharo, & Tadeo son Frere; Frederic Barroche, d'Urbin; Ferrando Fezonio, de Faïence, François Merlini; François Maffei; Hercules Ferrariensis, Sebastiano del Piombo, Venitien; Julio Clovio de Croacie; Jules Bonasone; Jean Baptiste Franc, Veronese, Jean Baptiste Fontane; Joannes Baptista Cavalerius; Joannes Majus, Romain; Jérôme Mucian de Bresse; Guerchin; Gorge [sic] Vassari; Giorgione de Castel Franco; Girolamo Porro Paduano; Guy Bolognese; Josepin; Jean Baptiste Mantuan; Julles [sic] Romain; Julio Campi, de Cremone; Diana Mantuana; George Mantuan; Jacques Palme, Jacques Tintoret, Jacques Bassan, & Jacques Palmette, tous quatre Vénitiens; Jacques Vignole; Léonard d'Elvins, Florentin; Leon d'Avesne; Lombard Lomb; Lobella; [ p. 292] l'Hespagnolet; Lælio da Novellare; Laurentius Garberius; Luc Cangiase, de Gennes; Lucas Penis, Romain; Louis Carrache; Louis Dominicain, Florentin; Martin Basse, Milanois; Michel Ange Bonarote, Florentin; Martin Rota; Michel Ange de Caravage; Marc Antoine; Mazza; Michel Ange Marolli; Marcellus Venustus; Nicolo Peres; Nicollo Nelli; Nicolas Beatricius; Nicolas Florentin; Odeart Fialetti; Paul Veronese; Paul Farinate; Perrin del Vague, Florentin; Pompeio Aquilano; Pietre Perrugin; Pietre Teste; Pietre de Cortone; Paulus Nardinus, Romain; Pietro Paulo Tozzi; Peregrinus Bononiensis; Paulus Gratiani; Polydore de Caravage; Raphael d'Urbin; Raphael de Regge; Raphael Guidi; Raphael Schiaminese; Robetta; Torellus Saraina, de Verone; Rosso Florentino; Sebastiano Serlio; Strada; Suavius; Sylvestre de Ravenne; Sophonisba Gentil-dona, de Cremone; Titian; Ventura Salimbene; Vincent Scamozzi, Venitien; le Valesio; Zacharias Dolendo.

Pour l'Allemagne & les Païs-bas: Albert Durer; Alde Grave; Abraham & Charles Blœmar; Adrian Colar; Adrian Vriez; Antoine, Jean & [ p. 293] Jerôme Wirix; Augustin Ostade; Adrian Soulers; Breugle; Barbé; Baliu; Bockland; le Maistre au Caducée; le Maistre aux Chandeliers; Crispin; Crispinian & Magdelaine Passe; Bavur [sic[1]] ; Corn Corn, Harlem; Corneille Cort; Corneille & Theodore Galle ; Claude Danchers; Clock; Crispin Queborne; Dominique Custos; le Delf; Deypenbeck; Does; Ferdinand Franc-flore; Falck; François Pourbuz; George Pens; le Gout; Goltzius; Greutter; Gilles; Jean, Raphael & Juste Sadelers; George Mostaer; Grebber; Georges Geldorp; Hopfer; Holbeins; Hondius; Hemskerck; Hollar; Herman Muller; Huberd Gerard, Hollandois; Jacob Bens; Jean Bolsuvert; Jordans; Jacques de Ghein; Isachs; Joannes ab Ach; Juste d'Egmont; I. Zancha, Polonois; Jean Rothenhamer, Josse de Vinghe; Joseph Heins; Jean Livens; Jean Ditmer; Lucas de Leyden; Lucas Cronis; Lucas Vosterman; Lindouen, Kilian; Mathan; Michel Mirevel; Michel Sniders; Martin de Vos; Mathieu Greutter; Matthias Kager; Michel Coccien; Maubeuse; Merian; Malery; Moncornet; Michel Natalis; Paul Rubens; Paul Pontius; Otho & [ p. 294] Gilbert Venius; Pierre Jode; Pierre Firens; Pierets; Paul Bril; Nicolas de Brun; Quelinus; Robert Pr. Pal. Reinbrand; Stachade; Suinderoph; Schut; Soutman; Spranger; Stradan; Saenredan; Spirinx Teniers; Theodore de Bry; Vandeich; Vanulich; Vanveld; Vanmol; Vanlochon; Vanmerln; Vanbroon; Valdor, & autres.

Pour la France & la Lorraine:

Abraham Bosse; l'Aleman; Augustin Quesnel; Adrian Souler; Belange; Bunel; du Breuil; Blanchar; le Brun; Brebiette; Boucher; Bourdon; Boulanger; Briot; du Bois; Claude Vignon; Claude Mellan; Couvai; Champagne; Chapron; Charpignon; Corneille; Caron; Claude la Dame; de Courbes; Charles & Jean Sarafin; Claude le Lorain; Charles Audran; Daniel du Moutier; Daniel & Jean Rabel; Denisot; Etienne de Laune; Etienne Moreau, de Reims; Ecman; Eustache le Sueur; Erar; la Fage; Freminet; François Perier; François Chauveau; François Dellarame; François peintre de Tours; François & Jean Poilli, Frosne; Gilles Rousselet; Georges Huret; Guillaume Perelle; Ganiere; des Hayes; la Hyre; Herman; Herbin; Hierôme, & Claude David; Jacob de Bie; [ p. 295] Jacques Callot; Jean Morin; Jacques Stella; Sebastien Vouillemont; Jean Marot; Jacques Toutin; Jacques Grand-homme; Jacques du Cerceau; J. Picart; Jean Trochel; Langot; du Loir; Lenfant; Léonard Gaultier; Michel l'Asne; Michel Dorigni; Mathieu; Mignar; Melchior; Tavernier; Nanteuil; Nicolas Cochin; N. Prevôt; N. Regnesson; N. de Son; N. Perei; Nocret; Perret; le Poussin; Pierre Daret; Pierre Scalberge; le Paultre; Philippe Thomassin; Remy Vibert; Ragot; Robert Boissart; Simon Vouet; Silvestre; Tetelin; Thomas de Leu ; & plusieurs autres [2].

J'ai aimé cette sorte de curiosité, dès les premieres années de ma jeunesse ; mais je ne l'ai point cultivée que depuis le tems que j'ai marqué ; & de ce que je l'ai préférée à la passion des Tableaux, dont j'ai fait aussi beaucoup d'estime, c'est que je l'ai trouvée plus  proportionnée à mes forces, & qu'elle sert davantage, que celle des Tableaux, à croître les Bibliotheques, puisqu'on [ p. 296] en fait des Livres. Que si nous avions en France une douzaine de Curieux en ce genre-là, & sur-tout entre les Gens de Condition, à qui les richesses ne manquent point, il ne se trouveroit pas assez de tailles-douces, pour les contenter ; & les œuvres de Lucas, d'Albert Durer, de Marc Antoine, & des Petits-Maîtres ; que nous achetons des quatre & cinq cens écus, chacunes, quand elles sont parfaites, en vaudroient trois fois autant : ce qui à peine seroit croïable à nous-mêmes, si l'expérience ne nous en avoit convaincus. Cependant les Pieces les plus cheres sont celles qui trouveroient le plus de débit parmi les Curieux ; & ceux qui ont été une fois touchés de cette sorte d'affection, ne la sauroient presque abandonner, tant elle a de charmes par son admirable variété. Il me semble que les Princes & les Seigneurs qui font des Bibliotheques, n'y devroient pas négliger ces sortes d'Ouvrages, qui en valent bien d'autres, & qui contiennent une partie considérable des belles connoissances, sur divers sujets; mais je n'en connois aucun qui s'en soit encore avisé, si ce n'est pour les Médailles, & pour quelques livres de Fleurs, d'Architecture,[p. 297] de Géographie, de Machines & de Mathématiques.

 

 


 

ONZIEME DISCOURS.

De l'excellence de la ville de Paris, servant de suite au premier , par lequel nous avons montré que les Parisiens, & le reste des François, ne sont point Barbares.

Tome III, p.194-224.

 

 

[P. 195] Les Arts s'y perfectionnent aussi tous les jours, & les plus nobles y sont venus à un tel point , qu'il seroit fort mal-aisé de faire accroire qu'il y eût quelqu'autre ville dans le monde, qui fût plus heureuse que la nôtre de ce côté-là.

 

[P.201] Pour la Gravure en taille douce, & pour celle qu'on appelle en eau forte, entre ceux qui s'y peuvent dire excellens, nous avons Claude Melan, pour un seul trait, & Robert Nanteuil de Rheims, pour les traits croisés & multipliés avec des points ; l'un & l'autre parfaitement habiles dans le Dessein, & qui nous ont donné des pieces que l'on peut mettre en comparaison de tout ce qui a paru jusqu'ici de plus rare en ce genre-la, soit des Hollandois, des Flamans, des Allemans ou des Italiens, quoique plusieurs y aient acquis beaucoup de réputation, & surtout du tems de Raphael & de Titien. Et de fait a-t-on jamais rien vu de plus exquis que le seul trait de la Veronique de Claude Melan, son S. François, son S. Bruno, & sa petite Madelaine pointillée, ses portraits du pape Urbain VIII, du Roi & de la Reine, de feu M. le Cardinal de Richelieu, du Cardinal Bentivoglio, du Marquis Justinien, de M. Peiresc, de Pierre Gassendi, de Jovanetus, de feu M. l'Evêque de Belley, de feu M. le Maréchal de Crequi, de M. le premier Président Molé, & de plusieurs autres, sont toutes pieces considerables. Et pour dire quelque chose de Robert Nanteuil, qui joint l'esprit, l'heureuse mémoire & le jugement, au bel Art dont il fait profession, il travaille au même tems que j'écris ceci, au huitième portrait de M. le Cardinal Mazarin; quoiqu'il ait parfaitement réussi aux sept premiers, ce qui est une marque bien assurée de l'estime qu'on fait de son admirable burin. D'ailleurs se voit-il des portraits mieux gravés & plus ressemblans que ceux qu'il a faits de la Reine de Pologne, de M. le Duc de Longueville, de M. le Duc de Bouillon, de M. le Maréchal de Turenne son Frere, de M. le Président Jeannin, de M. le Tellier, de M. d'Ormesson, de M. l'Archevêque de Tours, de Mrs les Evêques de S. Malo, de Troies & de Bayeux, de plusieurs autres Prélats, & Seigneurs de la Robe; de M. Hesselin, de M. Ménage de M. de Scuderi, de M. Chapelain, & peut-être de moi, à ce que disent ceux qui me connoissent, où il a voulu arrêter son craïon & son burin, quoiqu'ils ne dussent être emploïés que pour les grands Personnages, tels que ceux que j'ai nommés.

Outre ces deux excellens Graveurs, de combien de belles choses sommes-nous redevables à la main de Michel l'Asne, qui a fait plus de trois cens portraits; à celle du vertueux Gilles Rousselet, de Charles Audran, de Pierre Daret, des deux admirables Poillis, ([3]) de Georges Huret si riche dans ses Inventions, de Jean Convai, de Nicolas Regnesson, beau-frere de Nanteuil; de Lenfant, disciple de Melan; de Boulanger, du jeune le Brun, & de quelques autres que je ne connois pas. Pour l'eau forte, les plus habiles sont sans doute Abraham Bosse, François Chauveau, qui est si laborieux et dont les belles imaginations sont si heureusement exprimées, Michel Dorigni, Gendre et disciple de Vouet, Jean le Pautre, admirable dans l'abondance de ses inventions pour les cartouches & pour les ornemens d'Architecture & de Menuiserie, Nicolas Cochin, pour les Siéges de villes et pour les petites figures, Guillaume Perelle & Israel Silvestre pour les Païsages, Mauperché pour les Histoires, Marot, Cottelle & Pierriers pour l'Architecture, & plusieurs pour l'Ecriture, entre lesquels ont excellé Guillaume le Gagneur, Lucas Materot, Simon Frisius, Hubert Druet, Marie Pavie, Jacques le Beaugran Parisien, Beaulieu de Monthelier, Nicolas Gougenot, François des Moulins, Jacques Raveneau, Alexandre Jean, Jacques de His, Pierre Moreau, Philippes Limosin Parisien, André le Bé, Robert Vignon, Louis Barbe-d'or, Petré & Pietre Pé, & quelques autres dont nous avons des livres entiers.

 

[P. 215] Mais afin d'achever cette longue déduction, par quelque chose qui mérite qu'on s'y arrête, qu'on se donne la peine de voir les cabinets de ceux qu'on appelle Curieux. Il y en a plusieurs dans Paris de tableaux très exquis, tels que ceux de Madame la Duchesse d'Aiguillon, de M. de Liancour, de M. le Marquis de Sourdis, de M. de la Vrilliere, de M. de Crequi, de M. du Houssay, & de M. de Chantelou. Il y en a de tableaux, de Tailles-douces, & de Livres choisis, tels qu'étoient ceux de Claude Maugis, Abbé de S. Ambroise, de M. le Baron d'Ormeille, & du Sieur Kervel. Il y en a de Médailles d'or, d'argent & de cuivre, de Figures en bronze, de camaïeux, de basses-tailles & de Carnioles antiques, tels qu'étoient ceux des Sieurs des Nœuds, Goilar, Secrétaire du Roi, Gaud, Bretagne, & à présent ceux de M. De Seve, Prévôt des Marchands, & de Jean Tristan Sieur de S. Amant & du Puy-d'Amour, l'un des plus savans hommes qui fût jamais dans la connoissance des Medailles & des Antiques, comme il en a donné des marques bien assurées dans les trois volumes de ses illustres Commentaires historiques, aussi-bien que Guillaume du Choul, dans son livre de la religion des anciens Romains; mais par dessus tout cela le cabinet roïal de Monseigneur le duc d'Orléans est merveilleux en ce genre-là; comme ceux de madame la duchesse d'Aiguillon, & de madame de Chavigni, souffrent peu de comparaison pour la magnificence des Crystaux, des Lapis, des Agates, des Onyces, des Calcedoines, des Coraux, des Turquoises, des Aigues Marines, des Ametystes, des Escarboucles, des Topazes, des Grenats, des Saphirs, des Perles & des autres Pierres de grand prix qui y sont mises en œuvre dans l'argent & dans l'or, pour y former des Statues, des Obelisques, des Escrins, des Miroirs, des Globes, des Coffins, des Chandeliers suspendus , & autres choses semblables ; de sorte qu'on pourroit dire en quelque façon qu'il ne s'en perdit pas tant au sac de Mantoue, qu'il s'en trouve en ces lieux-là , tant la magnificence y éclate, quoique ce soit avec beaucoup moins de lustre, que la vertu des deux admirables personnes qui les possedent.

Parlerai-je après cela des autres cabinets qui sont dans Paris ? Il y en a qui ne sont que de Tailles douces, comme celui de M. de l'Orme, où il a fait une dépense très considerable; celui de feu M. de la Mechiniere, & le mien, où j'en ai ramassé plus de quatre - vingt mille différentes. D'autres sont de Tailles douces & de Desseins à la main des plus excellens Peintres, tels qu'étoit le cabinet du feu Sieur de la Noue. D'autres sont des singularités de la Nature, dans les Plantes, les Fruits, les Mineraux, & les Animaux dessechés, comme celui du Sieur Robin. Il y en a qui ne sont que de coquillages; & dans celui du Sieur Morin le Floriste, & l'un des hommes du monde le plus intelligent dans toutes ces raretés, j'ai vu des Papillons naturels, & contrefaits en miniature avec les Chenilles dont ils naissent, & les Plantes dont ils se nourrissent, avec une si nombreuse diversité, qu'il y a lieu de s'en étonner, aussi bien que de ses Marbres de mille especes, & de ses admirables Coquilles. Au reste, la connoissance qu'il a pour les Tailles-douces, qui font partie des belles curiosités, ne lui fait rien perdre de celle qu'il s'est acquise dans les Tulipes & dans toutes les belles Fleurs qu'il cultive en son jardin, avec beaucoup d'expérience & de soin. Il y a d'autres Cabinets de Curieux dans Paris, qui ne sont que de petites Figures de pierreries, tel que celui de M. Feydeau, chanoine de Notre-Dame. Il y en a qui ne sont que d'Annneaux; d'autres, que de Coupes de Calcedoine, ou d'Albâtre, & de Vases de Crystal, de Porcelaine & de Terre sigillée. J'en ai vu qui n'étoient que de Verres de diverses couleurs, comme celui de feu M. l'abbé de Louvois; d'autres ne sont que de Lames, de Fusils , de Carquois, de Dards & de Traits empennés; d'autre ne sont que de Livres & d'Instrumens de Mathématique, dont Ferrier & Blondeau sont des Artisans nompareils; quelques-uns ne sont encore que de Ciselures ; & celui de M. de Montmort, Maître des Requêtes, se peut dire composé de toutes ces choses-là : mais les Galleries de M. le cardinal Mazarin, ornées de cent Cabinets merveilleux, sont encore remplies de Statues antiques de Marbre, de Bronze & de Porphyre, de Tapis de Perse d'une longueur prodigieuse, de Tapisseries très-riches, & de Tableaux qui n'ont point de prix.

Toutefois ces choses-là ne sont rien, nous dit-on, en comparaison des richesses & des singularités que la pompe & la magnificence étalent dans les Palais de Rome. Je ne le voudrois pas contester , puisque des Romains & des Officiers mêmes de S.E. nous l'assurent; mais si j'étois fort ambitieux, je n'en souhaiterois pas davantage, & je crois que ce peu pourroit suffire, pour nous mettre au moins à couvert du reproche de la barbarie, contre ceux qui regardent la politesse & la civilité des Nations de ce côté-là. Je m'en suis assez expliqué; & si l'on ne fait point de scrupule, après toutes ces choses, de dire que les François sont grossiers & barbares, & que Paris est à la vérité une grande ville, mais qu'elle est barbare en comparaison de quelques villes d'Italie & des Païs-bas : chacun en pourra juger.

 

Dénombrement

Où se trouvent les noms de ceux qui m'ont donné de leurs livres, ou qui m'ont honoré extraordinairement de leur civilité.

Tome III, p. 225 et suivantes.

[Parmi des centaines de personnages rangés en ordre alphabétique, nous avons retenu seulement ceux qui avaient quelque rapport

à la gravure.]

 

Michel l'Asne, qui gravoit si proprement, comme il étoit de mes Amis, il m'adonné quelques estampes de sa main, & entr'autres le Portrait de M. l'Evêque d'Angers[4], Prélat que je viens de nommer.

…Jean de Boissiere, de Toulouse, entendu dans l'art de composer des Devises, pour le livre qu'il a fait sur ce sujet[5].

Abraham Bosse, de la Ville de Tours, Graveur excellent à l'eau forte, pour ses Livres de Perspective-pratique, suivant les Regles du Sieur Desargues, Lyonnois, qui a fait un Livre des Quadrans & de la Coupe des Pierres.

Pierre de Carcavi, de Lyon, Conseiller au Parlement de Toulouse, & depuis au grand Conseil, […] C'est encore par les mains de M. Carcavi que j'ai eu le Livre des Droits de la Reine, sur le Brabant ; comme ç'a été par ses soins obligeans que mes premiers Livres d'Estampes sont entrés dans la Bibliotheque roïale. Il a fait un grand travail sur les Médailles antiques, sans qu'il lui soit nécessaire de chercher d'autres secours, que de la prodigieuse abondance, dont il est le fidele dépositaire, depuis la mort de M. Bruneau, Abbé de Saint Cyprien de Poitiers, qui fut miserablement assassiné dans le Louvre par un voleur inhumain.

François Chauveau, Peintre & Dessinateur, grandement inventif dans ses desseins, pour plusieurs Estampes à l'Eau-forte, faites de sa main. Il y en a un nombre considérable pour divers commencemens de Livres que  j'ai faits, outre les Figures de ma Traduction de Virgile, de la premiere Edition.

Monsieur le Cardinal d'Estrées, Cesar d'Estrées, Abbé de Long-pont, depuis Evêque & Duc de Laon, & depuis encore Cardinal, lequel aïant connu, dès la premiere jeunesse, quand il emploïoit si heureusement ses jours à l'étude & dans l'amour qu'il portoit aux Belles -Lettres, pour les marques qu'il lui plût de m'en donner souvent, par les Theses qu'il soutint avec tant de capacité, jusqu'à mériter le dégré de Docteur de Sorbonne. Comme j'écrivois ceci, je reçus de M. l'Abbé, son Neveu Jean d'Estrées, Fils de M. le Duc d'Estrées, Ambassadeur de France à Rome, une grande These de Sorbonnique qu'il devoit soutenir deux jours après; le Mardi quinzieme de Novembre 1678, où il est certain qu'à son accoutumée il donna des témoignages brillans de son érudition. Cette These dédiée au Miroir de la Pénitence, Speculo Pœnitentiæ, au dessous d'une excellente Figure de la Magdelaine, levant ses yeux au Ciel, du dessein du Guide, aussi grande que le naturel, où toutes les Positions, traitant du péché originel, sont gravées au burin sur leurs neuf colonnes. Quel bonheur à l'Etat de voir des personnes de qualité donner de la sorte & de si bonne heure, des marques de leur érudition, comme fit ce jeune Seigneur, en cette occasion, sur des Questions difficiles ; car on m'a dit qu'il répondit admirablement.

Jacques Favereau, Conseiller en la Cour des Aides, celui pour qui j'ai composé après sa mort le Livre des Tableaux du Temple des Muses, enrichi de plusieurs Figures en Taille-douce, qu'il avoit fait graver à grands frais par les meilleurs Maîtres de son Tems, qu'il vouloit accompagner de Discours amoureux & moraux, & de Sonnets, lesquels il vouloit porter jusqu'au nombre de cent, pour appeller son Livre l'Ouvrage des cent Sonnets, faisant allusion au mot Sansonnets ; je ne sais pourquoi : car enfin M. Favereau montroit de l'esprit en tout ce qu'il faisoit. J'avois reçu de sa part quelques autres Vers latins & françois en l'honneur des Victoires du Roi.

Gregoire Huret, pour ses desseins d'Architecture, avec les feuilles imprimées sur ce sujet.

Jacques Augustin Lubin, de Paris, Augustin de la Province de Bourges, prédicateur et géographe du Roi, comme il se qualifie lui-même dans les Cartes géographiques qu'il a gravées de sa main, ou qu'il a dessinées, s'y appliquant avec soin, comme il s'en voit beaucoup de Descriptions. Il a travaillé sur le Livre des Villes de Stephanus ; mais cet Ouvrage n'est point encore imprimé. Il m'a donné quelques mémoires des Ecrivains de son Ordre, & quelques Figures des Maisons religieuses de sa Congrégation, dont il a fait les desseins, qu'Albert Flament a gravés […].

Louis Odespunck de la Meschiniere, né à Chinon, fut souvent emploïé dans les affaires du Clergé, dont il me donna les cinq livres qu'il fit imprimer dès l'année 1638. J'eus encore de lui ce qu'il composa des Ordres de Chevalerie, & les Discours qu'il mit au jour touchant les Recueils d'Estampes qu'il avoit faits en plusieurs Volumes, lesquels n'ont pas conservé toute l'estime que son travail avoit mérité.

Claude Melan, Peintre excellent, & Graveur admirable, pour plusieurs estampes de sa main.

Robert Nanteuil, de Reims, Peintre, excellent, pour quelques portraits choisis & gravés de sa main, & pour plusieurs vers de piété & d'autres à la louange du Roi & de la Reine, tournés d'une maniere élégante, & si fine , qu'il y a sujet de s'en étonner.

Monseigneur Henri de Savoie, Duc DE NEMOURS, qui m'honoroit de sa bienveillance, trouva bon de me communiquer ses pensées pour les Tournois, les Spectacles & les Ballets, qu'il fit dessiner par le Peintre Daniel Rabel, qui excelloit en ces choses -là, & me donna libéralement quelques livres d'Estampes , imprimés en Italie sur ce sujet, lesquels ont depuis passé  dans la Bibliotheque du Roi, avec tout le grand Recueil que j'avois fait dans cette sorte de curiosité, & que j'ai renouvellé depuis.

M. Petau, Conseiller au Parlement, pour quelques Portraits en Taille- douce qu'il aimoit grandement, & pour le livre des Antiquités de Paul Petau son Pere, qui étoit encore un savant homme.

Roger de Pile, né à Clameci, dans le Païs de Nivernois, pour son Livre de la Peinture, où il montre bien de quelle sorte il s'y connoît, & comme il écrit d'un style naturel.

M. l'Abbé de Pont-Chasteau[6], qui s'est peu soucié de tous les avantages de sa naissance & de son bel esprit pour demeurer dans le grand Monde, a mieux aimé emploïer ses jours dans une sainte retraite. En m'honorant de son amitié, qui m'a toujours été précieuse, il m'a donné plusieurs Livres curieux pour augmenter mes Estampes, dont j'ai fait un second Recueil aussi nombreux que le premier.

Gilles Rousselet, Peintre & Dessinateur, m'a donné plusieurs belles Estampes gravées de sa main.

Sebastien Bougonnet, dit Stella, parcequ'il est Neveu d'une Sœur de l'excellent Peintre Jacques Stella, comme il l'est aussi lui-même dans une société très vertueuse avec ses Sœurs, qui font de leurs mains des choses artistes, m'a donné divers Mémoires pour écrire la vie de cet Oncle que je viens de nommer, avec des Ouvrages de ses Sœurs; qui leur feront toujours beaucoup d'honneur.

Claude de Teroane, qui s'étoit acquis une si grande connoissance des Médailles antiques & modernes, & dont les observations curieuses n'ont pas été imprimées, mais qu'il a laissées avec son Recueil d'estampes, à M. de la Reynie, Maître des Requêtes, son bon ami, m'a donné à diverses fois sur ce sujet, deux petits Livres avec des figures, l'un de Maurice Seve, pour sa Delie, & l'autre plus considerable d'Horus Apollo, qui est un ancien Auteur dont il est parlé dans le quatrieme Livre de Properce, où il joignit encore quelques autres images curieuses , pour augmenter d'autant le nombre des miennes, qui est allé par deux fois presqu'au-delà de tout ce qu'on en pourroit croire.

François du Verdus de Bourdeaux, homme hardi dans ses pensées, non pas sans esprit, pour sa Version des Elémens de la politique de Thomas Hobes Anglois, d'une litterature consommée, & pour le livre des Statues romaines, du dessein & de la gravure de François Perier, qu'il me donna pour une marque de son amitié.

Claude Vignon de Tours, Peintre célebre de son tems, pour divers Mémoires qu'il m'a donnés pour servir à mon Histoire des Peintres que j'ai maintenant achevée: & encore pour quelques Estampes de sa main à l'eau forte.

 

 

 



[1] Johann Wilhelm Baur de Strasbourg. Le digramme vu est employé à la place de w inconnu des imprimeurs français. De même, plus bas, Bolsuvert doit se lire Bolswert. Le w est admis dans l'orthographe de l'Académie française depuis l'édition de 1878 de son dictionnaire.

[2] On pourra connoître tous ceux que l'Abbé de Marolles vient de nommer dans cette longue Liste , en consultant les Vies des Peintres de M. D'Argenville, le Moreri de 1732, & le Supplément de 1735, le Dictionaire portatif des beaux Arts de M. Lacombe, &c.

[3] On a un abrégé de la vie de Fr. Poilly à la tête de son Oeuvre, ou du catalogue de ses Estampes, donné par Hecquet en 1753.

[4] Henri Arnaud, évêque d'Angers, mort après 40 ans d'épiscopat le 8 juin 1692, âgé de 95 ans

[5] Traité des Devises , à Paris, 1657.

[6] Il se nommoit du Cambout de Coislin.

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Published by Aristarque - dans Histoire de l'art