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Ploss (Emil) :
Le type épigraphique "N.N. me fecit "
et son développement historique
jusqu'au Moyen- âge.
In memoriam Eduard Hartl † 4-1-1953
Zeitschrift für deutsche Philologie, 77, 1, 1958, pp. 25-46.
Traduction par Michel Wiedemann de: "Der Inschriftentypus "N.N. me fecit" und seine geschichtliche Entwicklung bis ins Mittelalter. In memoriam Eduard Hartl † 4-1- 1953" , Zeitschrift für deutsche Philologie, 77, 1, 1958, pp. 25-46.
Friedrich Panzer, le maître de cette discipline, a donné une représentation systématique de l'épigraphie allemande en 1952. [1] Avec elle, nous disposons pour cette branche encore jeune de notre archéologie d'une base de recherche qui vaut avant tout par sa division de la matière et garantit un double appui : réunion des inscriptions selon leur support, sur des bâtiments, des armes, des outils, des monnaies etc, et d'autre part selon leur contenu sacré, juridique, relatif à l'histoire du bâtiment, généalogique ou autre. Son œuvre majeure, l'édition entamée des inscriptions allemandes[2] , suit l'ordre géographique, qu'emploient aussi la plupart des travaux ethnographiques dans ce domaine. En 1953 parut la grosse thèse de Karl Frölich sur "Mittelalterliche Rechtinschriften im niederdeutschen Bereich[3] " [ Inscriptions juridiques allemandes dans le domaine bas-allemand ] qui donne accès à la matière traitée jusque dans le moindre détail. Il reste à faire pour prendre la suite de cet ouvrage la bibliographie des corpus et des publications dans lesquelles des inscriptions allemandes sont communiquées, et des publications fondamentales des pays voisins. Ce serait une des conditions prérequises pour une recherche sur les contenus, les époques et la géographie des inscriptions, puisque l'achèvement du corpus complet n'est pas prévisible pour le moment. Une vue systématique des inscriptions allemandes devrait comporter enfin l'examen du formulaire épigraphique : nous devons, dans la mesure où c'est possible, suivre historiquement ces formules héritées et trouver les types primitifs avant tout pour les inscriptions dédicatoires, funéraires, indiquant le possesseur ou le fabricant. Pour les nombreuses inscriptions sur les maisons, les outils, les cloches, les inscriptions juridiques et sacrées, les légendes de sceaux et de monnaies, les incantations pour éveiller l'amour, pour la santé, le climat, les bonnes récoltes, les conjurations et les acclamations , il n'y aura vraisemblablement pas de type propre d'inscription auquel on recourût toujours , puisque l'intérêt des commanditaires, maîtres des runes, tailleurs de pierres, forgerons et fondeurs, s'attachait souvent à des buts tout à fait déterminés et particuliers. Pour d'autres types facilement reconnaissables même à un examen superficiel, on peut reconstituer l'évolution depuis le Moyen-Age, voire depuis l'antiquité classique ou germanique. Friedrich Panzer l'a indiqué : " Pour les inscriptions en prose comme en vers, il est très général que le style épigraphique traverse les siècles en formules figées. En particulier la poésie populaire des inscriptions de maisons et de tombeaux historiquement attestées se manifeste pour ainsi dire toujours comme variation infinie d'un nombre limité de types préexistant depuis longtemps."[4]
Ici s'ouvrent pour la recherche comparative de riches possibilités. Il ne s'agit pas là de la dépendance des types d'inscription par rapport à l'Antiquité classique , notamment celle de l'époque romaine, mais de chaque réception et transmission de ces types . Siegmund Feist a examiné d'abord une série d'inscriptions runiques qui commencent par Moi, suivi du nom du maître des runes ou d'une caractéristique de sa personne[5] . Il voulait rattacher cette association du pronom de la première personne du singulier avec le nom à des formules orientales antiques et les expliquer comme des annexes des symboles religieux de la roue solaire et de la double hache (marteau de Thor) qui ont émigré d'Orient vers le Nord germanique. Il est difficile de suivre cette argumentation, car Feist juxtapose immédiatement aux inscriptions runiques des citations de l'orient antique, notamment de l'Ancien Testament (Prophètes et Décalogue), des inscriptions cunéiformes assyriennes et babyloniennes, et ne donne comme intermédiaires déterminants que les formules magiques grecques tirées du grand livre de magie de Paris [6] , mais pas d'inscriptions grecques ou latines. Malgré ces rapports qui ont un air forcé et étranger aux bonnes manières , la thèse de Feist est capitale parce qu'elle a mis en lumière le type "Ego N.N. feci (scripsi, dedi, etc ) ". Pour cela il a employé les inscriptions runiques suivantes: la pierre tombale de Hugl, le râtelier à lances de Kragehul, la paroi rocheuse de Valsfjord, le cor de Gallehus. Dans toutes ces inscriptions, le maître des runes ou l'artiste mettait en avant par cette double dénomination Ego N.N. sa puissance, son art. Il faut encore dire un mot de ce type. La présente contribution doit traiter une autre formule épigraphique : N.N. me fecit (dedit, donavit etc ). Alors que le type traité par Feist met l'accent sur l'artiste, le donateur, le commanditaire, ici l'objet est personnifié et on lui prête une voix. Bien que le centre de gravité de ce type demeure dans les inscriptions allemandes, on allèguera quelques citations classiques pour suivre avec un angle plus vaste l'évolution historique de la façon la plus claire possible. Les indications précieuses de G. Baesecke sur les inscriptions provinciales romaines[7] et celles de F. X. Kraus sur les inscriptions paléochrétiennes[8] méritent un plein respect. L'ordre chronologique de mon essai d'étude d'un type épigraphique des inscriptions allemandes de fabricant ou de dédicace est sans doute une échelle juste pour distinguer ce qui est propre de ce qui est étranger. Cependant l'étude épigraphique des types d'inscriptions allemands ne doit pas être conçue comme une simple annexe de l'épigraphie antique.
Le type N.N. me fecit est plusieurs fois présent dans les inscriptions grecques et latines. On remarque au premier coup d'œil la haute antiquité des inscriptions de ce type qui sont parmi les plus anciennes de ces peuples et qui présentent aussi des traits d'archaïsme linguistique. Le type s'exprime diversement: N.N. me fecit, inscripsit, donavit, collocauit. [9] C'est des environs de 589 av. J.C. que date l'inscription de circonstance d'un soldat grec sur une statue colossale égyptienne : ThlefoV m engrafe Ho Ialusio(V) . La même époque reculée est celle d'une inscription sur une stèle qui réunit deux attestations : meledainen me o SigeieV kai m epoeisen HaisopoV kai Hadelfoi (tit. atticus) [10] . Ce type fut aussi employé souvent par les sculpteurs pour les signatures. Sur une inscription très ancienne allant vers la gauche (6ème siècle av. J.C.), Aristion de Paros se nomme : Aristiwn m epohsen. [11] Une inscription milésienne sur une statue du 6ème siècle est formellement identique : EudhmoV me epoien [12] . Sur les œuvres les plus anciennes de la peinture de vase, les artistes signaient suivant le même type. Comme attestations importantes dans le domaine cultuel, on peut faire valoir deux autres inscriptions sur des œuvres de pierre : HermotimoV Lukeiou m e[po]]iei sur un autel de l'île de Théra[13] . MoisidhmoV katasthse me sur une statue de pierre de Famagouste à Chypre[14] . Il est en outre très vraisemblable que le fragment de la plus ancienne inscription sur une coupe de terre d'Asine de la fin de l'ère mycénienne, si on l'interprète à partir de l'écriture syllabique chypriote, livre une marque de consécration du même type: ...eqhke me ... [15] . Du fait d'autres interprétations tout à fait différentes par A.W. Persson et J. Lindquist, l'explication en est si discutée que malgré la séduction d'une date reculée, on se contentera de l'indiquer.
Par contre la lecture de la plus ancienne inscription latine sur la fibule d'or de Préneste, qu'on place aujourd'hui au 7-6ème siècle, est assurée. Elle livre d'ailleurs le nom du commanditaire ou du récipiendaire : Manios med vhevhaked Numasioi "Manius m'a fait pour Numerius" [16] . Dans la fameuse inscription de Duenos sur le trépied de Dressel (6-5ème siècle), la formule est intégrée dans un texte plus long : ... Duenos med feced ...[17] A peine plus récent est un récipient de bronze trouvé de nouveau à Préneste, la Cista Ficoroniana avec la marque de fabrique : Novios Plautios med Romai fecid "Novius Plautius m'a fait à Rome[18] ". Un signe indubitable de la faveur populaire d'un type épigraphique est toujours la structure parallèle de formules apparentées. Si dans le type N.N. me fecit l'objet indique sa provenance, il parle aussi dans les formules avec eimi et sum. Dans les cas de marques de propriété, il peut s'agir de malédiction magique du voleur, dans les dédicaces de cette sorte, une prière permanente au lieu saint. Une hache de bronze calabraise et une lanterne grecque du 6/5ème siècle av J.C. ont été alléguées par Larfeld comme exemples caractéristiques[19] . Elles nous conduisent vers des inscriptions italiques et latines qui sont plus importantes sous ce rapport. Sur un gobelet sicule on lit : touti Kemri poter em "Je suis le gobelet de Toutius Cemerius[20] " et pareillement dans des inscriptions osques assurées herentateis sum "Veneris sum " sur une table de pierre d'Herculanum et un récipient Luvcies. cnai. uiies. sum. "Lucii Nævii sum ".[21] Mais aussi des inscriptions sur des outils, par lesquelles le fabricant ou le donateur s'adresse à une personne tout à fait déterminée, l'ami à l'ami, le mari à sa femme, le jeune homme à sa bien aimée peuvent soutenir de tels types épigraphiques archaïques. De vieilles inscriptions sur les maisons ont souvent de grandes ressemblances avec les proverbes sur les cœurs de pains d'épices de notre fête de la dédicace des églises. En particulier les bijoux offerts doivent porter des mots tout personnels comme toi et moi. Parmi les pièces latines de l'époque impériale, on trouve avant tout sur des fibules : quod vis ego volo sur une fibule d'or de Bouvines près de Lille, judicio te amo sur une fibule de Trèves , tace; noli perier , ego te vidi alian saviare sur une fibule d'or de Volsinii en Etrurie, l'actuelle Bolsena[22] . On peut aussi trouver parmi les nombreux sceaux avec marque de fabrique et nom des pièces qui contiennent le type abrégé ou une forme apparentée. La preuve n'en est pas encore apportée, mais c'est vraisemblable pour la marque de fabrique d'une gouge de l'antiquité tardive, exhumée d'un ouvrage de palafittes du lieu dit Dimes[23] . Dans M.ATAR.F , la partie centrale ATAR est sans doute une abréviation pour deux ou plusieurs noms tandis que M et F peuvent être interprétés comme me fecit.
A côté de ces variations possibles se trouvent toutefois exprimées avec une netteté particulière des inscriptions vénètes du type cherché. Le groupe principal de toutes les inscriptions vénètes a été trouvé dans la région d'Este , l'antique Ateste, dans la région de Vénétie, quelques spécimens isolés dans les vallées alpestres près de Gurina, de Würmlach et le long de la Piave. Elles appartiennent aussi à l'époque préchrétienne du 6ème au Ier siècle. Plusieurs d'entre elles ont à peu près le type suivant en inscription dédicatoire : "Me donavit (dedit) Reitiæ (deæ Venetorum ) N.N." L'inscription sur le clou Conway PID 26 en est un exemple particulièrement remarquable : "meXozona .s. to reitiiah ner.ka lemeto. r.na" [A Reitia me donna Nerika Lemetorina] (Nominatif singulier d'un nom de femme lemeto.r.na , dérivé d'un nom de personne masculin Lemetor) . A côté de cette forme encore représentée par nombre d'autres inscriptions, il y a encore sa modification avec le vénète zoto "dedit"; comme preuve on peut alléguer l'inscription Conway PID 18 : meXo zoto vhuX. siia votna 'sa. i. nate i. re.i.tiia. i ...('sainatei est épithète de reitiai ) . Incertaines dans leur explication matérielle demeurent les inscriptions funéraires Conway PID 112 et 113, qui font parler la pierre tombale à la première personne suivant l'usage des anciennes inscriptions de possession. : eXo vo l. tiiomno. i. iuva. n. tiio. i. (N° 113) . Le nom ajouté (nom . sing.vo l. tiiomno. i. iuvan. t.s) se trouve au datif. Avec un certain esprit de simplification du problème, on pourrait qualifier ces inscriptions vénètes de derniers maillons d'une chaîne de tradition partant de la mère patrie grecque vers la Grande Grèce , en particulier vers l'Italie du Sud, de là vers Rome et enfin vers les peuples limitrophes du pied des Alpes, porteurs de l'alphabet norditalique et on pourrait comparer le trajet des types épigraphiques avec celui de l'écriture. Là pourraient s'insérer les inscriptions runiques et les spécimens de l'art sacré médiéval. Mais entre les plus anciennes inscriptions latines et la première trouvaille germanique de cette sorte, la boucle d'Etelheim, il y a en gros un millénaire . Cette durée considérable ne peut être expliquée simplement par le caractère fortement conservateur que possèdent la plupart des types épigraphiques.
On devrait donc au moins apporter la preuve que le type recherché était acclimaté même parmi les ouvriers les plus simples, qu'il était suffisamment populaire pour n'être pas oublié. Des germanistes ont émis l'idée que les types épigraphiques auraient connu le même sort que maintes chansons populaires. Comme celles-ci ont été chantées jusqu'à tomber en pièces, celles-là auraient été transcrites à outrance. Il semble y avoir une loi selon laquelle un type épigraphique reste durablement en vie s'il est transformé et demeure ainsi populaire , avec divers degrés. La forme pure, la plus ancienne, est ainsi isolée ou pour ainsi dire enkystée . Elle peut ainsi être conservée et rappelée à une nouvelle vie. Pour le type archaïque N.N. me fecit, les ateliers dirigés par des esclaves et en particulier dans les provinces frontalières en étaient les meilleurs conservateurs. L'adresse de l'artiste à son œuvre est sans doute issue immédiatement du type ancien . Trois pièces d'une trouvaille de récipients préchrétiens de l'antique Tarquinii sont signées de la main d'un esclave (abréviation s.) : a) Retus Gabinius C.s. Calebus fecit, occurrence d'un type usuel d'inscription de fabricant, mais aussi b) Retus Gabinio C.s. Calibus fec. te et c) Retus Gabinio C. s. C.s. feci te[24] . D'autres transformations se trouvent sur des récipients de diverses sortes comme gobelets, bouteilles, boîtes à fard, qui d'après l'index des lieux de trouvaille étaient aussi répandus dans les provinces de Germanie supérieure et inférieure. Sur des bouteilles qui furent trouvées surtout à Cologne on trouve: reple me, copo, conditi (copo= caupo; conditi= vini conditi) und reple me , / copo, meri / (meri = vini meri ). Le même ton joyeux se trouve sur d'autres inscriptions de récipients à boire: veni ad me , amica et bibe , amice de meo (sc. vino) et enfin sur une coupe de verre de Reims : a me, dulcis amica, bibe[25].
Ces inscriptions plus récentes sont aussi appuyées par d'autres formules qui contiennent également l'accusatif du pronom personnel de la première personne du singulier et qui ont le même air, mais qui sont de provenance différente. Citons-en en exemple un collier d'esclave : tene me, ne fugiam, et revoca me in foro Traiani in purpuretica ad Pascasium , dominum meum. Du lieu dit "Hohles Schänzle "à Nördlingen provient une courroie trouvée dans des fouilles dont l'inscription à son début est encore comparable au type plus ancien : Qui avet me , mirare, qui non aves tale, quere, quer [26] . Schick & Jänichen , les éditeurs, admettent que la courroie a été fabriquée dans un atelier local. On peut au moins expliquer ceci: quand après le haut Moyen Age, qui fut pauvre en inscriptions, le type latin N.N. me fecit (fudit) et le type allemand "N.N. machte, goß mich " apparaît dans le Moyen Age médian et tardif sur nombre de cloches, ce n'est pas une renaissance érudite, mais sûrement une continuation d'une vieille tradition d'atelier, qui , dans des domaines favorisés comme les villes romaines de Rhénanie, remonte à l'époque impériale. Celui qui par exemple admet la tradition ininterrompue des verriers rhénans pourra aussi admettre que les formules épigraphiques plus simples, employées par des ouvriers, se sont conservées assez longtemps jusqu'à ce qu'elles soient ranimées plus vigoureusement. Comme règle pourrait valoir que ce ne sont pas des types épigraphiques isolés, mais des groupes entiers rassemblés autour de formes fondamentales qui sont transmis à la postérité. On peut ici renvoyer au concept de champ lexical de Jost Trier.
Les inscriptions latines du haut Moyen Age ont été éditées dans des écrits d'histoire , d'histoire de l'art, et d'archéologie religieuse seulement par morceaux choisis et très dispersées. La commodité des CIG , IG et CIL, des grandes collections de Dittenberger & Dessau est maintenant dépassée, il n'y a pas non plus de bibliographie. Qui veut traiter des inscriptions médiévales et modernes doit compter sur des trouvailles de hasard en survolant leurs nombreuses publications. D'abord se rangent sous ce chef les inscriptions latines de l'antiquité tardive qui remontent à des artistes et ouvriers romains sous la domination des Goths, Francs et autres peuples germaniques et ont transmis au moins le type simple N.N. fecit. Sur des tuyaux de plomb trouvés à Roccalvecce en Etrurie le prince goth Theodahad (tué en 586) est donné comme constructeur d'une conduite d'eau : D(ominus) n(oster) gloriosissimus rex Theodahadus (fe)cit[27] . L'emploi du latin N.N. fecit par des artistes germains dans le domaine allemand est attesté par la boucle (le loquet de porte?) de Dietersheim , qu'il faut sans doute placer dans le 7ème siècle et qui porte sur les deux plaques la signature : "Ingeldus ficit"[28] . Les inscriptions de fabricant de l'antiquité, parfois si fières, cèdent la place le plus souvent à des communications fort modestes . Celles-ci se trouvent de préférence sur des objets de la vie ecclésiale et sont placées souvent après des formules chrétiennes de bénédiction . La première occurrence attestée du type complet se trouve sur la cloche de Thurdorf /Opf. C'est une cloche de Théophile, elle appartient au début du XIème siècle et porte l'inscription Wolfgerus me fecit [29] . G. Hager, éditeur de l'inscription, avait communiqué que la même marque de fabrique revenait littéralement sur les cloches de Theissen (province de Saxe ) et Aschara (Saxe-Gotha). Chr. Mahrenholz lit cependant l'inscription de cette dernière cloche : Noltgerus me fecit. Ces premières attestations de la formule complète ont l'air tout à fait archaïque si l'on veut bien les caractériser ainsi dans cette époque pauvre en inscriptions . Elles fournissent un parallèle important aux trouvailles de fouilles grecques et romaines des 7 / 6ème siècles. L'inscription est de nouveau en latin, elle faite au service de l'Eglise, mais elle naît quand même de la conscience de soi d'un artiste. Des déclarations d'artistes , qui rappelaient quelque peu la magie du Moi des maîtres de runes devaient éveiller les soupçons du Moyen Age. Ce n'est certes pas un hasard si les fondeurs, qui portaient le plus souvent l'habit d'un ordre religieux, ont lié la vieille marque de fabricant à une louange de Dieu. Peut-être se cachait dans cette prière permanente qui exprimait le nom de l'artiste sur une œuvre pie la croyance primitive des Germains à la puissance de l'écriture. Que ces inscriptions de fabricant médiévales ne représentent pas seulement l'héritage ranimé de l'antique formule, nous pouvons le comprendre si nous reculons encore dans le temps et si nous considérons les inscriptions runiques qui comportent aussi cette formule.
Parmi elles, celle de l'agrafe d'Etelheim se distingue par son âge. Elle appartient encore au Vème siècle, la trouvaille en Gotland semble renvoyer à des particularités linguistiques gotiques: m(i)k M(e)r(i)la w(o)rta . a(nsus) "Merila , Ase , me fit[30] ". C'est là l'inscription de fabricant dans sa forme pure et elle est peut-être bien la plus ancienne à ce jour du type étudié dans le domaine linguistique germanique, puisque l'inscription sur un os de Maria Saalerberg, que C. Marstrander voulait lire comme du type N.N. me fecit , s'est révélée un faux. Pour la période autour de 1000 on peut citer comme témoins les plus tardifs en écriture runique le cor de Florence : Andrell gerti mik [31] . Le prétérit gerthe " apprêta, réalisa" - l'anglais gøra "faire" montre clairement le sens le plus ancien- est aussi bien que woh(r)te (vieux norrois worahto) le prédicat dans de courtes inscriptions. Entre les deux monuments cités il y a une série de variantes; caractéristique est la liaison de la marque de fabrique avec l'indication du propriétaire: N.N. me fecit, N.N. me possidet. L'inscription d'une fibule de Northumbrie en est un bel exemple: Gudrid mec worh(t)e, Ælchfrith mec a(h). "Gudrid me fit, Ælchfrith me possède.[32] Une inscription norvégienne sur un bouclier apparaît avec l'accusatif-objet en position finale: Kunnar gærthi mik, hlhi a mik "Gunnar me réalisa, Helgi me possède[33] ". Une marque de fabrique du même type est aussi intégrée dans l'inscription runique étendue de la croix de Ruthwell . La première base d'interprétation du bâtonnet runique de Britsum (6-8ème siècle ), dont l'inscription n'est conservée qu'en partie au dos , fut aussi une forme dérivée de la formule : ... n / biri(d) mi "N.N. me porte "., mais l'interprétation qu'en fait Sophus Bugge[34] semble avoir besoin d'une révision. Il n'y a pas de doute sur la lecture de la fibule circulaire de Bülach (7ème s.) qui approche du type recherché : frifridil du/ft mik. D'après Kapteyn duft serait équivalent de gadufta et appartiendrait au protohaut allemand * duftjan ; le nom est incertain[35] . L'interprétation serait alors : "N.N. m'a acquis". S. Feist , dans la thèse citée, a voulu voir dans la formule à la première personne , dont l'inscription du cor de Gallehus peut valoir comme témoin majeur, une formule magique d'origine orientale . Dans les inscriptions funéraires , elle devait servir d'amulette au mort, mais aussi renforcer ou rejeter un enchantement . Mais comme l'auteur a inclus dans son corpus des inscriptions runiques sans aucun pronom personnel, on doit constater que pour une inscription de fabricant de type N.N. me fecit , il y a à peine une seule attestation. Chaque peuple qui produit des inscriptions en viendra sans doute de lui-même à cette forme simple entre toutes , sans copier un modèle d'une autre communauté linguistique ou scripturaire. Helmut de Boor reconnaît dans le type avec une mise en avant et une forme tonique du pronom Je un support de la magie : "L'apparition avec une puissance propre est une forme fondamentale de la magie et se trouve déjà très tôt dans la magie runique. Dans ce domaine le maître de runes aussi met ses forces en avant pour protéger ou pour menacer. Cela renvoie aux racines germaniques très anciennes de la magie du Moi[36] . " Hermann Hirt, qui a admis quelques inscriptions commençant avec le pronom germanique ek dans ses documents syntaxiques[37] , voyait dans cette formule la preuve qu'après la perte des terminaisons le pronom devenait de plus en plus indispensable. Si l'on comptait le type épigraphique Ego N.N. feci dans la syntaxe de tous les jours, le caractère magique de la formule en Je serait fort problématique. Comme proposition claire et générale on peut admettre celle de Wolfgang Krause: " En fin de compte il y a sans doute une signification magique sous-jacente même aux inscriptions communiquant des données apparemment profanes ou sans magie . On attribuait aux runes comme leur nom déjà l'indique, un effet magique. Celui qui taillait des runes sans plus entrait dans le domaine de forces mystérieuses[38] ." On fera mieux de ne pas examiner seulement l'inscription elle-même sous ce rapport, mais on pourra aussi tirer de la nature du support certaines conclusions sur le degré de caractère magique qu'il faut souligner dans une inscription commençant par Ich. On peut aussi assurer que le type Ego N.N. feci a appuyé le type N.N. me fecit. Celui-ci s'est conservé dans les runes assez longtemps pour être repris par les artistes et les ouvriers du Haut Moyen Age , même si nous désirions accorder plus d'importance à la tradition latine .
Une dernière voie de transmission serait fournie par les inscriptions paléochrétiennes dans les provinces romaines frontalières. Dans la collection topographique la plus complète, celle des provinces rhénanes par F.X. Kraus, il n'y a pas une seule attestation pour la période antérieure à 1200 du type N.N. me fecit. D'un certain point de vue, on pourrait cependant prendre en compte l'inscription sur un bassin d'eau bénite du trésor de la cathédrale de Spire , du premier tiers du 12ème siècle : Haertuuich erat factor et Snello mei fuit auctor. Ce n'est que sur la statue de Juliana à la cathédrale de Worms (13ème siècle ) que le fabricant et donateur se nomme : Otto me fecit . Adelbraht Monetarius.[39] C'est d'ailleurs sur des cloches qu'on doit chercher les première attestations dans le domaine de l'épigraphie chrétienne. Les plus anciennes cloches sont venues d'Orient. elle ne servaient qu'à rassembler les croyants comme on le faisait aussi par des signaux de trompette. C'est là un usage tout pratique , c'est pourquoi les plus anciennes cloches du Haut Moyen Age sont soudées au fer . Pour des inscriptions, il aurait fallu les faire ressortir par un long travail de repoussage ou par une gravure vigoureuse. Les cloches romanes aussi étaient encore petites , le plus souvent minces; elles rappelaient donc la forme cylindrique des cloches en fer blanc et portaient très peu d'inscriptions ou de décorations[40] . On a fait de telles cloches, sans les signer du nom du maître, parce qu'elles apparaissaient à peine comme une œuvre indépendante . On trouve donc d'abord sur des cloches de bronze des inscriptions occasionnelles; par exemple sur la cloche irlandaise d'Armagh (antérieure à 908) : oroit ar Chumascah, ~m aillelo " prière de demande pour Cumascah, fils d'Aillil [41] " . La plus ancienne cloche d'Allemagne dans l'église d'Iggensbach, Niederbayern, de l'an 1144, comporte une information toute factuelle : anno MCXLIIII ab incar. dni fusa e. capa[42] . Remarquable est l'information que Folcwin, abbé de Lobbes (965-990) près de Charleroi, rapporte à propos d'une cloche que son prédécesseur Harbert (835-864) aurait fait fondre : testatur campana percelebris eius iussu facta et nostræ ecclesiæ donata , in qua sunt versus , qui abbatem et factorem , vel ad quid facta sit , quasi ipsa de se loquente , hoc modo manifestant:
Harberti imperio componor ab arte Paterni
Nec Musis docta, en cantus modulator amœnos
Nocte dieque uigil depromam carmina Christo [43] .
Folcwin avait donc été frappé de ce que la cloche avait sa voix propre- quasi ipsa de se loquente - Il y avait plus nettement le même sujet sur une cloche qu'il fit fondre lui-même : Iussu Fulcuini me condidit artificis manus Danielis, ad laudem Triadis[44] . Les premières cloches d'assez gros calibre, qui pour la plupart ressemblent au type décrit dans la Schedula diversarum artium du prêtre Théophile furent fondues en Allemagne au cours du 11ème et du 12ème siècle. Trois qui ont déjà été citées , portent des inscriptions du type N.N. me fecit . On voit clairement que maint maître transmet intentionnellement son nom à la postérité. L'idée avancée par des historiens d'art que de telles inscriptions de fabricant , conformément à la pensée hiérarchisée en ordres du Moyen Age, indiquent le donneur d'ordre et non l'artiste, vaut plutôt pour des inscriptions sur des bâtiments . Pour le Moyen Age tardif , des documents d'archives attestent que les noms dans le type N.N. me fecit désignent presque toujours l'artiste[45] .
Dans la section suivante, un choix de citations attestera la vitalité de ce type. On n'en attendra pas l'exhaustivité , mais on tentera de présenter le plus grand nombre de variantes pour reconnaître le type dans ses ramifications les plus fines . Il serait aussi erroné de séparer les inscriptions latines et allemandes du Moyen Age, puisque ce sont des soeurs en habits différents.
Au XIII ème siècle, il n'y a guère que les cloches pour support des inscriptions du type étudié.
Regensburg (Ratisbone) , seconde cloche de la vieille chapelle : Me resonante pia populi memor esto Maria. F(ridericus) me fecit A° Di M°.CC° X° . LVII° (=1247). (Kunstdenkmäler Bayerns, XII, Regensburg II, p. 38)
Cathédrale de Mayence, cloche perdue de la tour occidentale, an 1298. (Texte sans doute mal lu ): Anno Domini MCCXCVIII virgula per / O Sanna Heisin ich aller Mainzer Glockin uber do, in Fulmen quando sono pluvias cum grandine pello/ Amon Albrech mache mich .
(Dt. Inschr. II, 31, n°26)
On doit remarquer la modification de l'inscription de la cloche personnifiée , ( fonte datée du 1er septembre 1366) à Saint Quintin de Mayence : Die lange glocke heise ich / des stede zu Mencze bin ich / meyster Peder von Mendze gos mich. (Dt. Inschr. II, 403, N° 755) [ Je m'appelle la cloche longue, je suis à la ville de Mayence, Maître Pierre de Mendze m'a coulée]. Du même maître provient une inscription analogue sur une cloche de Saint Emmeran à Mayence de l'an 1379.
Les inscriptions des fondeurs de Bamberg montrent quelles sortes de marques de fabrique se trouvaient encore : Cloche du 14ème siècle à Milz en Saxe - Meiningen: Der disse glocken gemacht Berlt Kessler (K.Sitzmann, in Der Mainbote von Oberfranken 1935, p. 60) [ Celui qui a fait ces cloches Berlt Kessler]
Cloche du XIVème s. à Linden : ich Berlt Keszeler han dise glocken gemacht (Sitzmann, loc. cit . ) [moi berlt Keszeler avons fait ces cloches ]
Cloche du XIVème s. tardif à Oberschlaichach près d'Eltmann : Cunrad me fecit . (Sitzmann, loc. cit.)
Deux cloches à Burgebrach, dont la plus grande date de 1351: MCf=Me Cunradus fecit. M.G.CUNRADUS= Mich gosz Cunrad. (Sitzmann , loc. cit. )
Deux anciennes cloches d'église de Unterwittighausen près de Tauberbischofsheim, refondues en 1906, inscriptions en minuscule gothique : kuncz kanngisser hat mich gossen anno domini mcccxxxi (Dt. Inschr. I, 164, N° 442). [Kuncz Kannegisser m'a coulée l'an 1331).
De la cloche de l'église de Tauberbischofsheim, fondue en 1448, citons seulement la fin : maria eiß ich, sturm , weter store ich, jacob stempfel goß mich, ananizapta, alpha et o (Dt. Inschr. I, 165, N° 445) Ananizapta, plus souvent Ananisapta , est d'ordinaire expliqué par un acrostiche "Antidotum Nazareni Auferat Necem Intoxicationis,Sanctificet Alimenta Poculaque Trinitatis Amen ". [ Que l'antidote du Nazaréen ôte la mort par le poison, sanctifie les aliments et les coupes de la Trinité . Amen] La formule devait servir à chasser la peste.
Le type ancien est depuis longtemps figé en signature de maître, cependant il est toujours transformé:
Sur la plus grande cloche de Kaichen en Hesse: Johann Peter Bach in Windecken goß mich / 1760 / in Gottes Nahmen floß ich [ Johann Peter Bach à Windecken me fondit en 1760. J'ai coulé au nom de Dieu. ] (Communication personnelle)
Cloche de 1555 dans l'église paroissiale de Blankerath près de Zell: In Namen Jesu flos ich/ Jacob Romel kos mich. (Walter, Glockenkunde [Traité des cloches ], p. 319) [ J'ai coulé au nom de Jésus, Jacob Romel me fondit ]
Cloche de la mairie de Elbing : Durch Gottes Hülffe gos mich 1593 Hermann Benning in Dantzig (K.Frölich, op. cit., p. 48). [ Avec l'aide de Dieu je fus coulée en 1593 par Hermann Benning à Dantzig ]
Il faudrait maintenant faire place à une "redécouverte" du type N.N. me fecit pour les inscriptions campanaires , puisque les cloches à cause de leur bénédiction par l'Eglise, de l'octroi d'un nom[46] , de leur emploi cultuel, et avant tout apotropaïque, furent bientôt senties comme des êtres animés, ce qui ressortait aussi de l'emploi de la forme de première personne. Le chroniqueur Folcwin de Lobbes trouvait encore au 10ème s. assez remarquable qu'une cloche "parlât comme d'elle même" . Le premier emploi de la formule dans l'artisanat ecclésiastique pourrait donc se situer dans la période carolingienne, après que le type archaïsant se fût conservé assez longtemps dans la marque de fabricant de l'antiquité tardive et de l'époque des runes pour trouver dans l'épigraphie ecclésiastique la voie pour devenir une signature universelle. Le type N.N. me fecit fut ainsi conservé au delà du Moyen Age jusqu'à l'époque moderne. Les premières attestations du type N.N. me fecit dans les inscriptions sur des bâtiments sont très éparses, et citent le plus souvent les maîtres d'ouvrage, lesquels appartiennent surtout au clergé. C'est très clair dans la formule modifiée N.N. me fieri fecit.
Portail roman de la Memorie, à la cathédrale de Mayence, début du 13ème siècle: Emcho Zan fieri me fecit. (Dt. Inschr. II, 62,N°71).
Clé de voûte du cloître de la cathédrale de Mayence: Ebirardus de Ybbelburn Decanus huius ecclesie me fieri fecit . Sub anno dni M. CCCC. quinto. (Dt. Inschr. II, 62,N°71) [47] .
Le Henricus me fecit sur un petit disque de pierre dans l'abside du Neumünster de Würzburg serait selon R. Rauh une marque du maître d'ouvrage et renverrait soit à l'évêque Heinrich de Rothenburg (995/96- 1018), soit à l'évêque Hermann (1225-1254)[48]. Il y a aussi des inscriptions , dans lesquelles des artistes et des ouvriers indiquent avec fierté l'achèvement de l'œuvre personnifiée de la même façon . La plus connue sans doute est l'inscription de la Wildenburg près d'Amorbach[49] , dans l'embrasure la fenêtre du mur occidental du palais: Bertolt murte mich Vllrich hiwe mich - owe muter [Bertolt me maçonna, Ulrich me sculpta . Hélas! ma mère]. On attribue ordinairement cette inscription aux années 1220 et on rattache le dernier segment ajouté à un vers de Wolfram: Owê muoter, waz ist got ? [hélas ma mère, qu'est-ce que Dieu ? (P 119/17). Grâce à la belle collection de W. M. Schaefer, qui d'ailleurs suivait un autre ordre, nous pouvons suivre la descendance de l'antique formule parmi les inscriptions sur des bâtiments de l'époque moderne :
Sur une maison de Kölschhausen (Hessen) 1605: Bawen ist eine Lust, / Kost vil Gelt. Hab ich nicht gewust. /Hans Jakob Andreas hat mich bawen lassen , / den 16 Martij Im iar 1605 . (Schæfer , op. cit. p. 50) [ Construire est un plaisir, il coûte beaucoup d'argent , je l'ignorais, Hans Jacob Andreas m'a fait construire, le 16 mars 1605. ]
Sur une maison de Peine (Niedersachsen ) 1620 : Anno partus virgine / 1620 Jordan Unverzagt / me fieri fecit (Schæfer, op. cit . p. 28)
Sur une maison de Riquewihr (Alsace) 1613: Allhie in gottes namen stehe ich / Jeremias Lichtenaer bauet mich / Von Rappoltzweiler gebyrdlich . (Schaefer, op. cit . p. 34.) [Je me dresse ici au nom de Dieu; Jérémie Lichtenauer me bâtit, natif de Ribeauvillé]
En Rhénanie, Schæfer nota ces paires de vers comme types revenant souvent: N.N. und N.N. haben es darzu gebracht / das ich worden her gemacht . [N.N. et N.N. sont parvenus à ce que j'aie été fait ]- N.N. et N.N. sont parvenus à ce que le maître N.N. m'ait fait . (Schaefer, op. cit. p. 36.)
Sur une maison de Holzheim [canton de Schleiden, Rhénanie] 1758: Hartgerus Holzem und Anna Barbara Wachendorff/ haben anno 1758 mich in Gottes nahmen erbawet . (Schaefer, op. cit . , p. 32). [ Hartgerus Holzem et Anna Barbara Wachendorff m'ont fait édifier en l'an 1758 au nom de Dieu. ]
Sur une maison à Ober-Ofleiden près de Homberg sur l'Ohm , 1818: Heinrich Schweißgut hat mich erbaut / mit Hilfe Katharina Metz als seine Braut / der Zimmermeister Heinrich Feyh / macht mich zum Holtz vor Silber und nicht vor Bley / Anno 1818 den 12 Junij bin ich aufgericht/ Gott bewahr mich nun vor Feuer und Bösewicht . (Schaefer,op.cit. , p. 35) [ Heinrich Schweißgut m' a élevée avec l'aide de Katharina Metz sa fiancée. Le maître charpentier Heinrich Feyh me fit en bois à partir d'argent et non de plomb . L'an 1818, le 12 juin je fus dressée . Dieu me préserve maintenant du feu et du méchant . ]
Le type semble avoir été plus rare dans le domaine bas-allemand. K. Frölich nomme un seul exemple: l'inscription sur la cuve / tasse baptismale de l'église de Bruch: Anno 1601 heft mi Wilken van Kempewegen wegen des Kaspels thom broke maken laten . (op. cit. p. 54) [L'an 1601 Wilken van Kempenwegen m'a fait épanneler à cause du diable ? [ formes dialectales inconnues ]
Plus rare était le type N.N. me fecit parmi les inscriptions sur des outils ; une variante comique est présentée par F. Panzer dans cette inscription d'un fauteuil de grand'père: Der Ähnel hat mich tauft, sein Enkel hat mich kauft, zu End wird um mich grauft . (F. Panzer, op. cit. , p. 292). [L'aïeul m'a donné son nom, le petit-fils m'a acheté, à la fin on se m'arrache. ]
Comme au Moyen Age bien des armes avaient reçu un nom et étaient regardées comme des êtres animés à l'instar des cloches, l'idée vient facilement de chercher des attestations du type recherché en particulier parmi les inscriptions sur des épées. Le butin est maigre. Le premier témoignage important d'une inscription d'épée est fourni par le chant de Beowulf (vers 1604-1696) : Hrodgar a lu en effet dans l'inscription runique sur la poignée pour qui l'épée géante avait été faite. Sur la forme linguistique de l'inscription, nous n'apprenons rien cependant, tout comme dans les mentions d'inscriptions sur des épées dans les épopées en ancien français[50],le contenu n'est pas mentionné . Lorsqu'on ne sut plus rien des runes en Allemagne , elles ne furent regardées que comme une décoration particulière de l'épée, comme on peut le déduire du passage cité mainte fois du Virginal : sô wârn im sîne velze/ mit buochstaben durchgraben guot / das vüert der selbe Sarrazin (Virg. , 37, 10) . Parmi les diverses inscriptions sur des épées médiévales, que R. Wegeli a réunies en anthologie[51] , on remarque deux groupes issus de la simple marque de fabrique N.N. me fecit : des épées du 11/ 12ème siècle, avec le nom d'Ingel (red entre autres ) et Ulfberht ; citons par exemple une épée pêchée dans l'Isac, un affluent de la Vilaine: Ingelred f(ec)it (aujourd'hui au musée de Nantes) . La signification des deux mots est inexpliquée, elle peut désigner des ateliers d'orfèvres expérimentés , un peu comme le tampon Solingen pour nos objets d'acier actuels. Sur des aciers d'épée très durs, on préférait des inscriptions fort courtes sur les lames ou de petits tampons, car le travail était extraordinairement dur. Dans de petits sillons qui s'élargissaient vers le bas, on faisait entrer à coups de marteau des fils d'or et d'argent. C'est pourquoi les inscriptions étaient plus volontiers gravées sur la poignée ou sur les barres de la garde qui étaient en métal plus tendre . Avec la technique plus simple de gravure au burin ou à l'eau-forte qui se répandit à la fin du Moyen -Age, on pouvait certes décorer les lames d'inscriptions plus longues, mais on a perdu le type ancien . La seule inscription d'épée que je connaisse qui se rapproche par la première personne du type N.N. me fecit est sur la garde d'une épée du XIVème siècle qui se trouvait autrefois dans la collection privée Zchille à Großenhain en Saxe. : Dextera Domini fecit virtutem - dextera Domini exalavit me . Sur la lame ne se trouve que la courte marque de possession: Gladius Rotgieri , même sum a été omis[52] . Des épées de familles plus nobles portaient le plus souvent la devise héraldique; l'épée d'Isabelle la Catholique(1479-1504) en fournit un bel exemple: Deseo sienpre onera, nunc caveo, pax con migo. "je désire toujours l'honneur, maintenant je suis sur mes gardes, paix avec moi [53] ". Même si l'épée parle elle-même, le lien avec le type N.N. me fecit (dedit, donavit etc) n'est nullement assuré.
Des inscriptions analogues sur des armes allemandes ne présentent qu'un rapport lointain. Ainsi l'épée de justice des collections de la Chapelle St Kilian à Wertheim ne parle pas elle-même, mais à la place du bourreau ; elle date des environs de 1700: Wan dem Armen Sünder wirdt abgesprochen das Leben, So wirdt er mir unter meine Hand gegeben . (Dt. Inschr. I, 190, N° 526 a) . [Quand on n'accorde pas la vie à un pauvre pécheur, alors il est livré à ma main ]. Cependant l'épée de justice de la Veste Coburg (17-18ème) présente la vieille formule : Me fecit Solingen (lecture personnelle). Une épée de 1643 sur laquelle on n'a pas de renseignements varie bien l'ancienne formule: Zieh mich nicht heraus ohne Noth , Steck mich nicht ein ohne Ehre[54] . [Ne me tire pas sans nécessité, ne me rengaine pas sans honneur ] . Les canons par contre ont une voix puissante qui leur est propre et parlent donc eux-mêmes dans leurs inscriptions. C'est le cas de deux canons de l'ancien arsenal de Berlin : Die scharffe Metze bin ich genannt / Von Herzog Julius hierher gesandt .[ on me nomme la cruelle Metze, le duc Jules m'a envoyée ici ] (des années 1570 et 1573) . Un canon de 24 livres de 1677 annonce : Wann man mich in Zorn gebracht, /So beweis ich meine Macht . (ancien arsenal de Berlin ) [Quand on m'a mis en colère, je prouve ma puissance ]. Une troisième inscription de canon est à trois termes. "Eine halbe Schlange heiße ich , Eiserne Kugeln und Feuer schieße ich, Was ich triff, das zerbrich ich ".[Je suis un demi-serpent; je jette des boules de fer et du feu ; ce que j'atteins, je le brise.]Cette inscription d'un canon de huit livres de 1534 (ancien arsenal de Berlin) pourrait d'après sa forme remonter à des inscriptions campanaires plus anciennes . On peut lui comparer à peu près l'inscription de la cloche de l'église de la ville de Tauberbischofsheim: " maria eiß ich, sturm, weter store ich, jacob stempfel goß mich." (1448) [ je m'appelle marie, je dérange la tempête et le mauvais temps , jacob stempfel m'a coulée ].
La plupart des inscriptions citées semblent au premier coup d'œil des avis tout à fait profanes, où l'artiste, le donneur d'ordre ou le propriétaire se nomment . Au lieu de tournures plus coûteuses, ils auraient juste choisi de personnifier l'œuvre, solution courte et commode : N.N. hunc anulum fecit comporte plus de mots que N.N. me fecit . Des inscriptions médiévales , par exemple de la forme N.N. hanc campanam fecit =N.N. a fondu cette cloche, sont bien plus rares. Ce souhait de brièveté, qui est accordé à notre type, est certes partagé par beaucoup , car le travail dans la pierre et le métal était pénible. Était-ce le premier ou même le seul motif du développement de ce type ? Il y a des inscriptions de fabricant bien plus longues dans le matériau le plus dur, et d'autre part dans le bronze ou le marbre plus tendre, les formules semblent comprimées au maximum. Le matériau du support ne semble avoir déterminé que rarement la longueur d'une inscription . Un premier jugement sur la stylistique des inscriptions est attendu de l'épigraphie classique, mais dans son jugement, de telles signatures, inscriptions de fabricant ou de propriétaire peuvent ne pas signifier grand chose, parce qu'elles s'effacent derrière de grands monuments comme le droit municipal de Gortyne ou le monument d'Ancyre. Elles attirent ceux qui s'intéressent aux arts ou à l'histoire culturelle et suscitent la participation des historiens si les noms propres sont importants pour la prosopographie. Albert Rehm s'est exprimé sous ce rapport dernièrement : "Il y a à peine un objet qui ne soit pas légendé occasionnellement par son fabricant ou son propriétaire. Une stylistique de ces inscriptions occasionnelles serait un jeu sans terme. L'archéologie germanique et allemande ne peut que rarement traiter des inscriptions de la taille d'une page, elle a toujours à faire avec des monuments plus petits . Aussi doit-on justement tenter avec ces inscriptions fort modestes de commencer une stylistique de l'épigraphie allemande, pour connaître le développement de son formulaire. De plus le rapport à l'écriture des peuples germaniques est à maints égards différent de celui de l'Antiquité classique et ce n'est que dans la phase archaïque que des traits apparentés se discernent des deux côtés . Il faut ici partir d'abord de la personnification des choses, qui est un trait de base d'une conception plus simple de la nature. L'homme parle avec l'objet comme avec un autre homme, et il parle en particulier avec les choses qu'il fabrique lui-même . Un charpentier dit à peu près à un clou plusieurs fois tordu : "Tu tiens enfin maintenant !" La preuve que le dialogue avec sa propre fabrication s'est introduit dans les inscriptions est fournie par l'inscription païenne sur un récipient déjà citée: Retus Gabinio C.s. feci te . Même si cette attestation vient relativement tard, elle caractérise cependant le domaine mental auquel appartiennent les inscriptions avec ich [je ]ou mich [me ] . On ne peut dessiner que très grossièrement les racines de ces représentations:
Dans le culte, l'homme cherche à nouer un rapport avec des êtres plus puissants , il sacrifie, apporte des offrandes. On pourrait donc admettre sans difficulté que l'offrant veut s'effacer derrière son offrande: car elle parle elle-même et nomme celui qui l'offre. Notre type épigraphique a été employé comme formule de consécration, c'est prouvé suffisamment par l'inscription d'Exoidas ("Exoidas m'a érigé pour les fils du grand Zeus", voir plus haut ) et par les marques sur les clous de bronze vénètes. L a formule est restée identique pendant des siècles, ils étaient offerts à la déesse Reitia avec la formule: "Me deæ dedit (donavit) N.N." L'inscription grecque sur l'autel de Théra pourrait servir de preuve matérielle, et de même peut-être le Duenos me feced dans l'inscription en vieux latin du trépied de Dressel, puisque le début Iove pourrait indiquer comme destinataire la divinité suprême. Quant à la signification des inscriptions dédicatoires avec nomination, on peut sans doute, d'après M. P. Nilsson, tirer les meilleurs enseignements d'une inscription grecque d'Oropos, qui prescrit de choisir trois hommes, qui reçoivent en dépôt du hiérarque les objets nuisibles et doivent les fondre sous son contrôle . Une partie de l'or doit être conservée en souvenir, le reste de l'argent et de l'or doit être transformé en récipients . On se souciait cependant de conserver le souvenir de l'offrande et du donateur ; les noms des donateurs doivent être inscrits sur une pierre avec le poids et la description de chaque offrande[55] . On peut donc être sûr que notre type était dès l'origine une formule de consécration rituelle . Un rapport comparable à celui qui existait entre les hommes qui sacrifient et les dieux pouvait aussi se créer entre amis, artistes et donneurs d'ordres, seigneurs et serviteurs . La supposition qu'avec le type traité, une très vieille formule de consécration a trouvé sa forme épigraphique, gagne en vraisemblance, si l'on songe qu'il est fréquemment représenté dans l'antiquité classique et germanique par des inscriptions archaïques .
Y a-t-il un rapport étroit entre les objets qui dans leurs inscriptions parlent avec je et moi et les inscriptions de fabricant (par ex Ego N.N. feci ) accentuées par le pronom de la première personne ? Des occurrences irréfutables de ce dernier type ne nous ont été laissées que par les Vénètes et les Germains[56] , dans la mesure où j'ai aujourd'hui un panorama des éditions d'inscriptions . Comme inscriptions à caractère magique insistant sur la force magique de la première personne , elles faisaient certes plus d'effet que la marque de fabrique usée N.N. me fecit , mais son influence étendue tenait sans doute plus à sa forme frappante qu'à son contenu . Ce n'est que dans le monument germanique de cette sorte le plus ancien, dans la boucle d'Etelheim, que le type s'élève par l'appel au dieu des runes Wodan [a(nsus) "Ase"] au dessus des inscriptions informatives ordinaires[57] . Le résultat le plus important de cette étude serait donc , que le type N.N. me fecit (dedit, donavit,dedicavit, inscripsit, etc) n'était pas seulement d'origine archaïque chez les Grecs et les Romains, mais aussi chez les Germains et qu'il remonte vraisemblablement au-delà du seuil de l'écriture . Si l'on recherche d'autres instruments dotés de la parole dans l'antiquité germanique, on sera frappé par les remarquables urnes à visage du groupe silésien, que l'on tient pour protogermaniques et qu'on considère comme " des représentants de la culture des Germains orientaux[58] ." Même si les urnes à visage sont bien plus anciennes que les premières runes germaniques, elles montrent que l'idée de l'objet parlant était bien familière. Il est très significatif qu'à l'époque des inscriptions dialectales italiques qui révèlent des formules avec sum et me fecit, de tels vases à visage apparaissent aussi dans le domaine italique[59] .
Malgré des recherches attentives, il n'a pas été possible de trouver une attestation du type étudié dans les inscriptions des Celtes continentaux[60],. Dans le Corpus Inscriptionum Indicarum[61] il n'était pas non plus représenté parmi les nombreuses inscriptions de fabricant et de dédicace et en fin de compte la coupe d'Asine vers 1200 avant J.C. est trop controversée avec son inscription en grec archaïque , de sorte que l'on doit rejeter la conclusion tentante que dans notre type serait conservée une formule de consécration du peuple indo-européen primitif . Tant que de nouvelles trouvailles n'auront pas étendu le domaine du type de façon importante, le chemin allant de la Grande Grèce par Rome vers les porteurs de l'alphabet nord-italique, les Vénètes, montrera que les Germains n'ont pas seulement créé les runes d'après une série de lettres des alphabets nord-italiques, mais qu'ils ont aussi emprunté des formules d'inscriptions de l'épigraphie classique . Peut-être la formule antique se cache-t-elle sous une formule de consécration germanique . La survivance des traditions d'atelier antiques et la conservation du type, même dans les inscriptions runiques tardives, lui ont tracé la voie à travers le Moyen-Age vers l'époque moderne . Il expire finalement dans les inscriptions rimées de cloches et de maisons et dans les signatures abrégées de maîtres . Si cet examen d'une formule épigraphique allemande a recouru davantage à l'épigraphie classique qu'au fonds des inscriptions allemandes, c'est seulement pour montrer les racines d'une tradition dont les rameaux se voient plus facilement . L'édition suivante du grand recueil des inscriptions allemandes va sans doute encore apporter de nombreux matériaux .
Bamberg
Emil Ploss.
[1] Deutsche Philologie im Aufriß, hersg. von W. Stammler (1952) Bd. I, Sp. 270-314.
er-blog.com/_tiny_mce/plugins/paste/blank.htm#_ftnref2">[2] Die deutschen Inschriften , hrsg. von den vereinigten deutschen Akademien , Bd I f. , Stuttgart, 1942 ff.
[3] Nd. Mitteilungen , IX, Lund, 1953, p. 5-59.
[4] Panzer, op. cit. Sp. 274.
[5] S.Feist ," Religionsgesch. Bedeutung der ältesten Runeninschriften" , Journ. of Engl. and Germ. Philology, XXI (1922) 601-611. [Signification des plus anciennes inscriptions runiques pour l'histoire des religions ]
[6] Edité par C. Wessely: Griech. Zauber papyri, Denkschr. der Wien. Akad. der Wiss. Phil.-Hist. Kl. 36 II, 27 ff.
[7] G. Bæsecke: Vor- und Frühgeschichte des dt. Schrifttums. Halle 1940, I, 119 fol.
[8] F.X Kraus: Die christl. Inschriften des Rheinlandes , Freiburg , 1890-1894 .[ Les inscriptions chrétiennes de Rhénanie]
[9] Nous les citerons le plus souvent d'après Dittenberger et Dessau; les inscr. sont publiées dans CIG, IG, CIL, mais corrigées dans les éditions de morceaux choisis.
[10] W. Dittenberger , Sylloge Inscr. Græc. 3. Aufl. Leipzig, 1915, ff, I c et ibid. I, 2 B.
[11] E. Löwy : Inscr. griech. Bildhauer. Leipzig, 1885. p. 14, n° 11.
[12] Löwy , op. cit., p. 55, N° 3.
[13] H. Collitz, F. Bechtel: Sammlung d. gr. Dialektinschr. III, 2 (Göttingen 1905) N° 4729 (lecture de U. von Wilamovitz-Mœllendorff.)
[14] ibid. I, 1884, N° 127 , en écriture syllabique.
[15] Voir là-dessus A.Rehm : Die Inschriften, in Handbuch des Archäologie, Textband I , (München 1939), p. 191.
[16] H. Dessau: Inscr. Lat. selectæ, 2ème éd. , réimpression Berlin, 1954/55, III, 2; N° 8561.
[17] Texte cité d'après B. Maurenbrecher, Philologus LIV, 633. Voir sur l'inscription de Duenos E.Goldmann: Die DuenosInschrift. Heidelberg , 1926. [et toute une bibliographie.]
[18] Dessau, op. cit. III, 2, 8562.
[19] L'inscription sur la lame de la hache réunit sum et me fecit ... Slotty ,op. cit, p. 129, Larfeld , op. cit. p. 454.
[20] Lecture et interprétation de Dirichs ,op. cit. p. 55. D'après Vetter, Hdb des ital. Dialekte, Heidelberg, 1953, n°186, l'inscription n'est pas osque, mais appartient à un peuple d'origine italique ou illyrienne habitant lepays avant l'invasion samnite.Sur les citations falisques et osques, voir Fr. Slotty, op. cit.
[21] R. von Planta : Grammatik der oskisch-umbrischen Dialekte, Straßburg, 1892 bis 1897, II, 510,N° 117; II, 527, N° 172.
[22] Dessau, op. cit., III , 2, 8624, 8623bc; perier = peierare.
[23] Altertümer unserer heidnischen Vorzeit, herausg. v. Röm. - Germ. Zentral museum Mainz, I, 12 ; 5, 12.
[24] Dessau, op. cit. III, 2, 8566, abc
[25] Dessau, op. cit. , III, 2, 8609 hi, 8608 ab, 8610.
[26] Schick & Jänichen : Germania, Anz. d. röm. germ. Kommission 32 (1954)p. 303. Trad. proposée: "Qui me possède m'admire, toi qui n'as rien de tel, achète, achète! "
[27] O. Fiebiger : Inschriftensammlung z. Gesch. d. Ostgerm. Akad. Wiss. Wien. Denkschr. phil. hist. Kl. 70/3(1939), p. 28sq.
[28] Altertüm. uns.heidn. Vzt. III, 9, 4,7. Capitales sont les mentions d'orfèvres germains et de leurs rapports avec les métiers d'art antiques. Si l'on ne tient pas compte des orfèvres récemment contestés de la Vita Severini d'Eugippius, la première mention sûre est à chercher dans la Vita Eligii. Eligius [Saint Eloi ] fut d'abord orfèvre et monétaire sous les rois mérovingiens Clotaire II (†629) et Dagobert I (625-639).Eligius employait aussi des Germains dans son atelier : Fabricabat in usu regis utensilia quam plurima ex auro et gemmis ; sedebat fabricans in defossum et contra eum Thille uernaculus eius ex genere saxonico et au chap. 10b (p. 678) on nomme Tituinus genere Suevus.
[29] Die Kunstdenkmäler v. Bayern II, 11 (1909) sous la dir .de G. Hager , p. 151.
[30] W.Krause , Runen inschr. im alten Futhark (= Schr. d. Königsberger Gelehrt. Ges. geisteswiss. Kl. XIII/4, 1937)N° 85,p. 610 sq.
[31] G. Stephens , The Old Northern Runic Monuments of Scandinavia and England, London and Kopenhagen, 1886-1901, IV, 99.
[32] Stephens, loc.cit., I,386. Cf H. Arntz-H.Zeiß: Die einheimischen Runendenkmäler des Festlandes. Leipzig, 1939, p. 161.
[33] Arntz & Zeiß , ibidem.[...]
[34] ZfdPh . 40 (1908) p. 174-184. Cf W.J.Buma: "Das Runenstäbchen von Britsum", PBB 73( 1951), p. 306-317.
[35] PBB 58 (1934) p. 299-305, 59(1935), p. 317. Cf Arntz -Zeiß, p. 167 sq.
[36] H. de Boor , in : Germ. Altertumskunde, hrsg. v. H. Schneider, München, 1951, p. 350.
[37] H. Hirt, Handbuch des Urgerm. Heidelberg, 1931- 34, III, 92.
[38] W.Krause : Was man in Runen ritzte, 2ème éd. Halle , 1943, p. 53.
[39] Kunstdenkmäler von Bayern, Pfalz III, bearb. von B.H. Röttger, München, 1934, p. 310. F.X. Kraus : Die altchristlichen Inschriften der Rheinlande, Freiburg i. B. 1890-1894. II N° 174 a.
[40] Très instructif est l'article sur les cloches du Dictionnaire d'Archéologie chrétienne et de liturgie , éd. F. Cabrol et H. Leclercq , III, 2, 1914, col. 1954-1977. Cf aussi l'article de Chr. Mahrenholz in Musik in Gesch. u. Gegenwart, op. cit.
[41] Dict. d'Arch. op. cit., col. 1685.
[42] Kunstdenkmäler v. Bayern XVII (1924), bearb. von K.Gröber, p. 128.
[43] MGH , SS IV, 60. Folcuini Gesta abbatum Lobiensium. Cf K.Walter: Glockenkunde , 1913, p. 155.
[44] MGH SS IV, 71, Walter, loc.cit., p. 156.
[45] Cf K.Sitzmann : "Die Bamberger Gießhütte" , in Bamberger Bll. f. Kunst und Gesch. IV (1927), p. 42-44.
[46] Pour le couvent St Trond , rien que sous l'abbé Rodulf (1108-1138),on fondit 11 cloches, dont chacune reçut un nom particulier. Le Chronicon Hildesheimense mentionne que le couvent reçut au XI ème s. une cloche au nom significatif de Cantabona . Cf O.Lehmann-Brockhaus: Schriftquellen zur Kunstgeschichte d. 11 u. 12 Jh. (1938), N° 701,576.
[47] La formule est très fréquente, le plus souvent en latin. Cf Kunstdenkm. von Bayern. Regensburg II, 286: Puits de la cour nord du chapitre : anno dni 1545 dna Wandula de Schaumberg Abbatissa me fieri fecit.
[48] R. Rauh, op. cit. p. 25 sq.
[49] R.Rauh, op. cit. ,p. 24, cf F.X. Kraus,op. cit. II, 40, 83 pour des inscriptions allemandes en vers de ce temps.
[50] Voir le recueil dans A. Schultz : Höfisches Leben, 2ème éd. , 1889, I, 11, remarque 5.
[51] R.Wegeli: Inschriften auf mittelalterliche Schwertklingen. Dissert. Zürich, 1904.
[52] Wegeli, op. cit. p. 34 . Pendant la correction , le prof. Schwietering m'a indiqué qu'on avait conservé une épée du XIVe s. avec l'inscription Gicelin me fecit . Cf Nd. Zs. f.Vk. I (1932)= Niederdeutsche Zeitschrift für Volkskunde, I, (1932) ?
[53] aujourd'hui à l'Armorio Real Madrid . Cité d'après Stephens, III, 165. Cf aussi l'inscription sur l'épée d'un pistolet[ ?] in Shakespeare, Henry IV, 2e partie, acte 2, scène 4.
[54] Dt. Inschriften auf Haus und Geräth, 2. Aufl. Berlin, 1875, p. 145. L'éditeur est inconnu. Cf F.Stroh, Handbuch des germanischen Philologie, Berlin, 1952, p. 578.
[55] M.P.Nilsson: Gesch. d. griechischen Religion, I, 75 f. (=Hdb. d. Alt. Wis. V, 2, 1 München 1951.)
[56] Les inscriptions du même genre datant du Moyen Age et de l'époque moderne n'ont sans doute qu'une ressemblance fortuite . Cf la cloche de Linden (14ème s.): ich Berlt Keszeler han dise glocken gemacht (voir plus haut)[moi Berlt Keszeler j'ai fait cette cloche ] ; l'épée de justice de Lemgo: Dieses Schwert ist gewetzet,/ Und ich dazu gesetzet,/ von Gott und Obrigkeit / Zu strafen böse Leut . [ Ce glaive est aiguisé et je suis préposé par Dieu et par l'autorité à punir les méchants ] le Je du glaive est là pour représenter le bourrreau.
[57] W. Krause: Runen inschriften im ält. Futhark, op. cit. p. 613. Des inscriptions de ce genre ne renvoient pas à lla magie aussi clairement que les mots rituels fréquents sur des bractéates d'or des 5/ 6ème siècles , alu "objet protecteur, amulette" selon l'interprétation ordinaire, lathu "citation ", lauKar " Lauch [poireau]". Qu'ils n'aient pas immédiatement le caractère d'amulette est démontré par la grande distance qui les sépare de la boucle de Strand (Norvège, 8/9ème s.): siklisnahli ( sigli's naudha hlé )" les bijoux sont un remède contre le besoin."D'après W. Baetke : Die Religion der Germanen in Quellenzeugnissen, Frankfurt a. M. , 1944, p. 158.
[58] Reallex. der Vorgesch. Hersg. von Ebert , V, 1 (Berlin 1926), p. 304. (Seger).
[59] Fr. Slotty, op. cit. p. 170. Plaute , Rudens 478: "nam hæc (urna Veneria ) litteratast, eapse cantat , cuia sit " appartient selon Slotty au même domaine imaginaire.
[60] J.Rhys: The celtic Inscriptions of France and Italy, in Proceed. of the Brit. Academy, London 1905/6. p. 273. Citons en exemple une inscription sur une coupe de bronze du Musée de Dijon: Doiros Segomari ieuru Alisanu "Doiros fils de Segomaros l'a fait pour Alisanos. " (Rhys N° III, p. 282). Les mêmes formules de base suivent les N° II, IV, VI, X, XXV, XXXIII a.
[61] New edition by E. Hultzsch, I (Oxford 1925), II (Calcutta 1929). Les inscriptions de fabricant ou de bâtiment ont plutôt le type N. N. fieri fecit, à côté se trouve mis en avant presque toujours le nom du maître d'ouvrage, le plus souvent du roi. Pour des exemples éclairants pour les marques de fabricant indiennes de forme simple N.N fieri fecit , voir Epigraphia Indica, VII (1902/3)p. 47 sq, 108 sq, XII (1913/14), p. 299. Cf CII II, 1, 133, N° 68; 134 N° 71